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Article Le Monde

Article RFI

Les BRICS décident d’accueillir de nouveaux membres sous la pression de Pékin et de Moscou Réunis en sommet à Johannesburg, le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud ont entériné l’élargissement de leur groupe à six nouveaux pays, dont l’Iran et l’Arabie saoudite, à partir du 1ᵉʳ janvier 2024. Par Bruno Philip(avec Benjamin Barthe et Ghazal Golshiri) Publié le 25 août 2023 à 05h30, modifié le 25 août 2023 à 11h18 Le ministre saoudien des Affaires étrangères Faisal bin Farhan Al Saud lors du sommet des BRICS 2023 à Johannesbourg (Afrique du Sud), le 24 août 2023. MARCO LONGARI / AP Le 15ᵉ sommet du groupe des BRICS – Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud – s’est conclu, jeudi 24 août, à Johannesburg, sur l’élargissement significatif de cet attelage hétéroclite de cinq grands émergents qui représentent 40 % de la population mondiale. Six nouveaux pays vont ainsi faire leur entrée dans ce club ambitionnant d’offrir un contrepoint à un ordre international encore dominé par les Etats-Unis et l’Occident : l’Iran, l’Argentine, l’Egypte, l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et l’Ethiopie devraient intégrer l’organisation le 1er janvier 2024. Le président chinois, Xi Jinping, a salué « un élargissement historique » et prédit un « avenir radieux pour les BRICS ». Vladimir Poutine, sous le coup d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) consécutif aux crimes commis par la Russie en Ukraine, n’avait pas pu faire le déplacement, mais, lors d’une intervention en visioconférence, le président russe s’est félicité du « rôle et [de] l’importance [croissante] des BRICS dans le monde ». Les décisions prises lors des sommets des BRICS supposant le consensus, les pays membres ont négocié ferme jusqu’à mercredi soir pour trouver une position commune, notamment sur la question des critères d’admission. La longueur des pourparlers s’explique sans doute par les difficultés du club des cinq à contourner les lignes de fractures qui le traversent. L’Inde, grand rival de la Chine Les critères d’entrée de nouveaux pays au sein du groupe restent cependant assez flous. « Les conditions d’adhésion au groupe sont ambiguës et le groupe entretient cette ambiguïté, a relevé Hasni Abidi, chercheur au Centre d’études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen, dans un message posté sur le réseau X (anciennement Twitter). Le critère économique n’est pas le seul élément pour retenir une candidature, en témoigne le fait que des pays comme l’Indonésie et le Nigeria, dont l’économie est plus forte que celle des nouveaux élus, [par exemple ] l’Ethiopie et l’Egypte, ne sont pas admis. » La Chine et la Russie étaient les partisans les plus décidés de l’élargissement : Pékin parce que cette expansion est susceptible d’accroître l’influence de la Chine dans le Sud global ; Moscou car elle peut contribuer à relativiser l’actuel isolement de la Russie. L’Inde et le Brésil étaient les plus réticents à accepter de nouveaux membres : l’Inde, le grand rival de la Chine, craint qu’un élargissement trop rapide et trop important ne profite surtout à Pékin, tandis que le Brésil redoute de voir son influence diluée. New Delhi, qui entend devenir l’une des figures de proue des pays en voie de développement, poursuit un agenda aux antipodes de celui de Pékin, qui est obsédé par la création d’une alternative politico-économique à la prééminence des pays de l’Ouest : « Nous ne voulons pas voir les BRICS se transformer en une plate-forme antioccidentale qui servirait avant tout les intérêts de la Chine et de la Russie », résume une source diplomatique indienne. Une rencontre surprise La stratégie multi-alignée de l’Inde consiste à élargir tous azimuts son périmètre d’action diplomatique, quitte à pratiquer un délicat équilibrisme. Le premier ministre, Narendra Modi, s’est, pour sa part, déclaré « heureux » que les pays membres aient pu se mettre d’accord « sur les principes directeurs, les normes, les critères et les procédures d’expansion ». Surprise : en marge du sommet, M. Modi et le président chinois Xi se sont brièvement entretenus. C’est seulement la deuxième fois que les dirigeants se rencontrent depuis les violentes échauffourées de juin 2020 au pied de l’Himalaya, dans la région du Ladakh. Ils ont appelé à une « désescalade » de la tension le long de leur frontière commune. L’Iran, sans doute le nouvel entrant le plus controversé, a célébré sur le réseau X « un succès stratégique de [sa] politique étrangère ». Une réussite qu’il convient cependant de relativiser : « Devenir membre des BRICS est une victoire politique, mais l’Iran est aux prises avec de nombreux problèmes économiques et politiques qui ne pourront pas être résolus » avec cette entrée, constate Hamidreza Azizi, chercheur à la Stiftung Wissenschaft und Politik, un centre de réflexion à Berlin. Le mauvais état de l’économie iranienne, toujours confrontée aux sanctions américaines en raison de la poursuite de son programme nucléaire, n’est pas le moindre des handicaps pour Téhéran. La République islamique ne pourra pas bénéficier des investissements de la Nouvelle Banque de développement, la banque des BRICS établie à Shanghaï, dont les transactions s’effectuent en dollars… Prudence de l’Arabie saoudite Une quarantaine de pays avaient exprimé avant le sommet leur intérêt à intégrer les BRICS, vingt-deux d’entre eux ayant fait formellement offre de candidature. L’expansion du groupe devrait accroître son poids économique : à onze, les BRICS totaliseront 36 % du produit intérieur brut global (en termes de parité de pouvoir d’achat) et 46 % de la population mondiale. Même si l’inclusion de l’Arabie saoudite dans cet ensemble devrait contribuer à renforcer l’influence diplomatique du royaume, ce dernier a affiché une curieuse prudence après avoir reçu son ticket d’entrée : le ministre des affaires étrangères, le prince Fayçal Ben Farhan, a annoncé que Riyad entendait étudier plus en détail la proposition avant de « prendre la décision appropriée » d’ici au 1er janvier 2024. « La réaction saoudienne est un peu réservée, confirme une source proche des cercles de pouvoir à Riyad. L’Arabie saoudite veut étudier les termes exacts de son inclusion, qui ne lui ont pas encore été communiqués. Les Saoudiens veulent comprendre précisément ce qui sera requis d’eux. » Bruno Philip(avec Benjamin Barthe et Ghazal Golshiri)