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La mondialisation et les firmes multinationales

Un médecin spécialiste en cardiologie part assister à un Congrès pharmaceutique parrainé par le laboratoire ROCHE. Il vole sur la compagnie DELTA en classe business. Durand le vol, il travaille sur son ordinateur portable TOSHIBA, téléphone à partir de son mobile NOKIA. Arrivé à l’aéroport il loue une voiture FORD chez HERTZ ou AVIS. Dans sa chambre de l’hôtel SOFITEL, il allume son téléviseur à écran plasma SONY, trouve dans le frigo de la marque BOSCH du COCA COLA, de l’eau d’EVIAN, du chocolat NESTLE, des yaourts DANONE, du Champagne MUMM. Des produits d’accueil du parfumeur GUERLAIN sont à sa disposition dans la salle de bain. De sa fenêtre, il peut lire les néons publicitaires des marques CANON, BMW, PEPSI, RENAULT, AMERICAN EXPRESS. Savez-vous où se trouve notre congressiste international ?

Devinette

La mondialisation est l’accélération du développement de l’activité économique à l’échelle internationale. Le terme anglais qui lui correspond est «globalisation» et le terme américain «globalization». La mondialisation n’est pas un phénomène nouveau. C’est la variante contemporaine du capitalisme qui débute en 1990. Avec la mondialisation, ce qui est nouveau c’est :

  • La diversité de son champ d’action qui concerne la sphère politique, culturelle, économique, la communication, les marchés, l’idéologie, le tourisme, etc.
  • L’absence d’alternative globale et crédible au néo-libéralisme (qualifiée également de pensée unique) et la radicalisation du libéralisme et de ses prétentions.
  • La rapidité des changements et la succession de ruptures depuis 1990 : chute du mur de Berlin, désagrégation de l’URSS et du bloc communiste, nombreux conflits régionaux, crises financières, crises sanitaires, crises climatiques, etc. Il y a surtout l’émergence de pays nouvellement industrialisés qui offrent des opportunités pour les investisseurs étrangers car les marchés intérieurs sont en forte croissance. Il s’agit des pays suivants : Brésil, Inde, Chine, Afrique du Sud, Mexique, Turquie, Thaïlande, Indonésie et des pays anciennement communistes appelés en transition (Russie, Chine).

La mondialisation - définition

Pour comprendre les étapes et les mutations en oeuvre, il faut considérer l’articulation de trois sphères : commerciale (échanges), financière (capitaux) et productive (production). Chaque phase du capitalisme est caractérisée par une architecture spécifique entre les capitaux, les échanges et la production. C’est ainsi qu’on distingue :

  • l'économie inter-nationale (16ème aux 1960’s),
  • l'économie multi-nationale (1960’s aux 1990’s)
  • l'économie globale depuis 1990’s.
Cette typologie est empruntée à l’économiste C.A. Michalet (2004), auteur de Qu'est-ce que la mondialisation aux éditions La Découverte et de Mondialisationj, la grande rupture en (2009).

Les étapes de la mondialisation

Schéma 1 Articulation des 3 sphères en phase inter-nationale

Source : N. Fabry (2020)

Cette première étape couvre une période très longue allant du 16ème siècle aux années 1960. Les Etats sont des acteurs majeurs qui contribuent à intégrer les sphères financières, commerciales et productives. Le pouvoir d'une économie sur le marché mondial dépendait de la puissance de sa structure industrielle et commerciale nationale. La dimension internationale avait une fonction très particulière : celle de permettre, au sein de l'Etat-Nation, une meilleure allocation des ressources et donc une amélioration du bien-être.

Etape 1 : l'économie inter-nationale

Schéma 2 Articulation des 3 sphères en phase multi-nationale

Source : N. Fabry (2020)

Cette étape 2 couvre va des années 1960’s aux milieu des 1990’s. La dimension mobilité des firmes (donc activités productives) domine. On assiste à une extension géographique du mode de production capitaliste (via les firmes multinationales) et à la mise en place d’une division internationale destinée à gérer les filiales. Les systèmes productifs perdent leur ancrage national et obligent à faire la distinction entre le PIB (Produit intérieur brut) et le PNB (produit national brut). Les entreprises s’émancipent de la tutelle de leur Etat d'origine et de l’habitacle national jugé trop étroit. La finance et le commerce sont dérivés des investissements des firmes à l’étranger et croissent moins vite que ces investissements à l’étrangers.

Etape 2 : l'économie multi-nationale

Schéma 3 Articulation des 3 sphères dans la mondialisation

Source : N. Fabry (2020)

La globalisation ou mondialisation, couvre la période depuis la fin des années 1990 à nos jours. Les caractéristiques majeures sont la prédominance de la sphère financière caractérisée par une croissance en volume des flux financiers et la « financiarisation » des comportements des entreprises. Parallèlement, on constate un très fort développement des autres sphères. Les vagues de libéralisation (GATT puis l'OMC), l’adoption de politiques de développement axées sur l'ouverture et les échanges, la reconstruction des dynamiques régionales (intégration - régionalisation) et la très forte progression des investissements directs étrangers (IDE) caractérisent cette période. Les trois sphères tendent à évoluer de manière autonome, ce qui favorise la généralisation des crises.

Etape 3 : la mondialisation
  • Augmentation des mouvements de biens, de capitaux et de services via les échanges et les investissements internationaux et surtout la mobilité simultanée des facteurs (travail, entreprises) et des capitaux.
  • Multiplicité et variété des acteurs (entreprises, pays) qui contribuent au renforcement de la concurrence internationale au niveau des prix et de la qualité.
  • Les biens échangés sont de plus en plus incorporels : droits de propriété et compétences côté sphère réelle, capitaux côté sphère financière.
  • Multiplication des migrations humaines : développement des migrations Nord-Nord et dans une certaine mesure Est-Ouest (qualifications, tourisme) MAIS restrictions sur les migrations Sud-Nord (immigration).
  • Intégration des facteurs sociaux et culturels dans la concurrence mondiale (mise en compétition des systèmes sociaux).
Les manifestations de la mondialisation
  • Levée d’obstacles (déréglementations) aux échanges ou aux mouvements de capitaux : droits de douanes, législations, normes applicables au marché du travail, politiques qui régissent la concurrence, l’innovation et les droits de propriété intellectuelle qui à titres divers facilitent les mobilités et les échanges.
  • Adoption de la monnaie unique en Europe : intégration monétaire des marchés
  • Progrès techniques dans dans les transports aériens, transports ferroviaires (TGV) et maritimes (cargos containers); les TIC communication et développement du e-business, etc.
  • Transformations radicales de «l’organisation industrielle » : flexibilisation du modèle fordien (généralisation du modèle japonais et des méthodes japonaises de production, développement du co-working), restructuration des firmes et financiarisation de leurs stratégies, pratique de la sous-traitance, des délocalisations, de l’offshoring, l’outsourcing, etc.
Les éléments facilitateurs de la mondialisation

Actuellement, la régulation mondiale est assumée à la fois par :

  • les Etats (politique et stratégie militaire) et groupements d’Etats (G7 à G20);
  • le marché lui-même dominé par les Firmes multinationales.
Le principe de l’Etat acteur économique au sens « d’Etat producteur » a été abandonné, tout comme celui du principe d’un secteur public fort dans le secteur concurrentiel (mouvement de privatisations). L’Etat a vu ses fonctions reformulées : soutien à la technologie, à la R&D, à l’éducation; régulateur en amont des marchés. La crise des sub-primes et des fonds souverains (2008) a remis en selle les Etats : soutiens financiers aux banques et aux entreprises ce qui a pour corollaire de fragiliser les finances publiques. La crise du Covid-19 à permis aux Etats de monter au créneaux pour soutenir avec plus ou moins d’empressement l’économie et la reprise. Dans la suite du cours nous allons nous intéresser aux Firmes multinationales (FMN).

Etats, FMN et régulation mondiale

Une Firme multinationale (FMN), est une entreprise qui exerce directement ses activités dans plusieurs pays. Sa structure (organigramme) comprend une maison mère issue du pays d’origine, et des filiales, implantées dans les pays d’accueil. Ces FMN sont en général de grande taille. Elle ont une base nationale (pas de firme apatride) mais leur stratégie est conçue à l’échelle mondiale. De ce fait, leur structure organisationnelle est spécifique et complexe. Une FMN se définit plus par son action à l'international et son origine nationale que par son statut car avec la croissance des pays émergents, des FMN originaires des BRIC sont de petite taille relativement aux géantes américaines ou européennes.

Les firmes multinationales (FMN) - définition

Les 5 types de stratégies (cumulables) à l’international

Pour le tourisme une ressource primaire "rare" peut-être un paysage unique (plage, montagne, île, etc.), un monument (Tour Eiffel), une oeuvre d'art (La Joconde), etc.

Il s’agit pour les firmes d’accéder aux ressources ou produits indisponibles dans le pays d’origine pour des raisons climatiques ou géologiques. Ces produits ont souvent un caractère stratégique (pétrole, gaz, uranium, terres rares, cacao, café, etc). Cette stratégie est à l’origine des premières FMN qui cherchaient dès la fin du 19ème siècle à avoir un accès direct aux matières premières, minérales, énergétiques et alimentaires. Les filiales prennent la forme de plantations, de mines d’extraction, de gisements de pétrole… La transformation industrielle poussée des ces ressources ne se fait que rarement sur place. 
Citons quelques exemples de FMN : Bauxite (Rhône-Poulenc, Alcoa) - Total, Elf, Standard Oil (Pétrole et gaz) - Michelin, Goodyear, Firestone (Hévéa), Nestlé (Café, chocolat) et maintenant les terres rares pour fournir les batteries électriques embarquées dans les produits (voitures, mobiles, ordinateurs, etc.).

Les stratégies des FMN - L'accès aux ressources primaires

Pour le tourisme, il s'agit de permettre aux clientèles de pouvoir bénéficier de prestations relativement standardisées dans tous les hubs urbains du monde. Les chaines hotellières pratiquent beaucoup cette stratégie (Accor, Mariott, etc.), tout comme le Club Med.

Il s’agit pour les firmes de créer une ou des filiales «relais » de la maison mère. La FMN cherche à capter des parts de marché dans des pays ayant un niveau de développement relativement similaire et élevé. Il s’agit de dépasser l’étroitesse du marché national mais aussi de contourner les barrières protectionnistes. Il peut aussi s’agir de se rapprocher de la demande (nouveaux comportements de consommation ou marchés tests) et de se mettre en conformité par rapports aux normes techniques et sanitaires dans les secteurs sensibles (industrie pharmaceutique, COGEMA). Les entreprises sont dans ce cas précis amenées à différencier les produits pour tenir compte des spécificités nationales.

Les stratégies des FMN - La stratégie de marché ou stratégie horizontale

Pour le tourisme il s'agit de proposer des séjours "all inclusive" à des prix bas dans les hotels-clubs (Maroc, Tunisie, Turquie, etc.) souvent gérés par des gros opérateurs comme TUI ou encore les croisières qui embarquent des personnels issus de pays à faibles salaires.

Il s’agit pour les firmes de créer une ou des filiales «ateliers». Il s’agit de tirer avantage des différences internationales dans la formation des coûts. Les Firmes installent des filiales là où les prix des facteurs de production sont les plus bas. La production locale est ensuite réexportée vers le pays d’origine ou des pays tiers (économies d’échelle). Depuis les années 1990, on observe un glissement de la rationalisation des activités intensives en main-d’oeuvre non qualifiée vers celles intensives en travail qualifiée. En effet, durant les années 1970s, il s’agissait de rechercher une main d’œuvre non qualifiée (bas salaires) pour effectuer des opérations standardisées d’assemblage. Désormais, à cette stratégie de base se greffe la recherche d’une main d’œuvre qualifiée et à bas salaire et concerne de plus en plus les opérations de conception (prothèses dentaires), les services à l’industrie ou la culture (tournages de films).

Les stratégies des FMN - La stratégie verticale de minimisation des coûts

En hotellerie, les hôtels sont "light assets". Par exemple, le groupe ACCOR ne possède pas les bâtis.

Les FMN créent des filiales détenues sous forme minoritaire. Il s’agit de Joint-Ventures, de transferts de technologie, d’alliances et de partenariats industriels, de fournitures de services sur la base de matières premières ou d’inputs fournis par le donneur d’ordres. Ce sont des formules souples pour les investisseurs (pas d’immobilisations financières importantes) ce qui permet aux entreprises de diversifier les risques, réduire la masse des salaires et se «recentrer sur leur métier de base». Ces nouvelles formes sont souvent imposées par les pays hôtes (Chine, Russie, etc.) qui pensent éviter la colonisation économique de l’occident. Or il faut faire la part des choses entre propriété du capital et propriété économique effective liée à la maîtrise technologique et à la maîtrise des marchés (canaux de commercialisation). 
Nike ne possède pas de filiales mais a recours à de l’outsourcing. Elle a recours à des entreprises (production / services) extérieures à la société pour réaliser des projets spécifiques au lieu de les réaliser par elles-mêmes. L’entreprise ne maitrise que le développement de produit en amont, le marketing et la gestion de la marque en aval. Le reste (production des pièces, assemblage, vente) est externalisé.

Les stratégies des FMN - La stratégie technico-financière

Dans le tourisme, on a des stratégies globales dans le secteur aérien et hotellier. Les voyagiste, cherchent à valoriser les éléments de singularité des pays pour donner envie de voyager mais leur stratégie commericale et marketing sont globales.

Il n’y a pas de firme globale, il n’y a que des stratégies globales c’est-à-dire des stratégies à la fois verticales et horizontales dont l’esprit est parfaitement illustré par le slogan d’IBM : « Think global, act local » ou « glocal ». Les modes de consommations restent très marqués par les cultures et les habitudes « nationales » et avec le croissance et l’émergence des BRIC on observe un développement de compétences très pointues et localisées que les FMN sont en mesure de défricher et de valoriser. Ainsi, les FMN offrent une relecture des distances géographiques et des hiérarchies régionales. Les distances géographiques sont de moins en moins importantes tandis que les distances culturelles (religieuses, politiques), organisationnelles et technologiques deviennent de plus en plus importantes.

Les stratégies des FMN - la stratégie globale
  • Parce que l'avantage intangible des firmes repose plus sur des avoirs créés que sur des avoirs naturels (knowledge based economy), la concurrence incorpore de plus en plus des critères « qualitatifs » comme les normes environnementales, les technologies de pointe, le respect de l’éthique et la responsabilité sociale des entreprises.
  • Qu'on soit une firme ou un pays, on ne peut pas être « pour » ou « contre » la mondialisation : on en est victime ou bénéficiaire. La mondialisation est donc plus « subie » que « voulue ».
  • La stratégie des FMN dans la mondialisation se traduit par une mise en concurrence des territoires et des pays ce qui pose le problème de l'attractivité des territoires / pays / destinations. cela pose également le problème du rôle de l'État pour valoriser cette attractivité et de son articulation avec les collectivités territoriales.
Les stratégies des FMN - synthèse

Terminé

  • Il devient de plus en plus difficile de raisonner en termes de « made in … ». Le terme le plus pertinent devient « made by… ». La production perd progressivement ses attaches territoriales parce que la stratégie des FMN consiste à réaliser des arbitrages permanents entre actifs financiers et territoires. Mais les temps changent et un certain retour du « Made in …. » est observable de nos jours.
  • La crise sanitaire (confinement en Chine) et maintenant le conflit en Ukraine exposent au grand jour les excès de la mondialisation ou du moins la sous-estimation des risques d’une dépendance forte vis-à-vis d’un approvisionnement issu d’un seul marché : blé et l’Ukraine, paracétamol et masques chirurgicaux en Chine, etc. L’avenir nous dira si les circuits-courts et si le renchérissement du coût des transports ne va pas modérer le recours systématique à la mondialisation et favoriser des mouvements de relocalisations.
Les stratégies des FMN - synthèse

Les marques citées - pour la plupart produites par des firmes multinationales (FMN) - sont disponibles sur les principaux marchés mondiaux. Cette devinette laisse supposer qu’il s’agit d’une métropole internationale. En tout cas aucun indice laisse entrevoir une spécificité nationale …… La mondialisation ne serait qu’un vaste marché uniformisé? Nous allons voir que le tourisme permet de montrer que à l’ère de la mondialisation, la spécificité et la différenciation sont des éléments importants. Autrement dit, pour bénéficier de la mondialisation, il faut être en mesure de se spécialiser.

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