Caverne-lataniers
afac974
Created on April 9, 2023
commentaire du dessin de Mortier de Trévise, 1861
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La Caverne des Lataniers
Le dessin provient de la collection numérisée par Iconothèque historique de l'océan Indien: Excursion au volcan de Bourbon, Hippolyte Charles Napoléon Mortier de Trévise - 1861. 24,5 x 32 cm (im.) conservé aux Archives départementales de La Réunion, 40 Fi Le site du pas des sables, à La Réunion, est fréquenté depuis les débuts du marronnage, dont la période la plus intense est située entre 1715 - mise en culture du café - et 1780 - industrialisation sucrière en cours. Une carte de Lépervenche de 1878 indique la caverne, non loin du lieu-dit Les feux à Mauzac, autre toponyme attribué à un grand chef marron.
François Cézaire de Mahy, 1830-1906, est le père des deux petites filles nommées: Florence, 6 ans, née en 1855, et Adèle Louise Hortense Thérèse, 4 ans, née en 1857. La mère des enfants, Valentine Panchaud de Bottens, est àses côtés. D'origine suisse, elle est sans doute familière des hauts sommets. Denis-André Le Coat de K/véguen, le beau-frère de Mortier de Trévise, ne fait pas partie de l'expédition, à moins que ce ne soit lui qui discute dehors avec l'un des guides? Cette hypothèse semble peu probable, dans la mesure où Mortier de Trévise souhaite immortaliser cette aventure, et les personnes y ayant participé. Or, il ne mentionne pas son beau-frère ... François de Mahy a 31 ans au moment de l'excursion - ce n'est pas la première fois qu'il s'aventure au volcan: il a déjà fait une première expédition en 1854-. Médecin, comme son père, il exerce à Saint-Pierre, avant de se lancer plus tard dans la politique, à l'avènement de la Troisième République; il deviendra alors député de La Réunion jusqu'à sa mort en 1906.
Le propos est sans doute tenu par l'une des deux silhouettes visibles à l'extérieur de la caverne. S'agit-il de compagnons de voyage? ou bien des guides? Il n'est en effet pas possible de s'aventurer seul-s- dans cette partie montagneuse et escarpée de l'île. Il faut requérir l'aide des habitants des Hauts, surnommés à cette époque Blancs des Hauts, - des créoles appauvris depuis 1848, parfois même avant - qui parcourent ces zones arides et froides en hiver, les connaissent, en tant que guides, comme Josémont Lauret - 1819-1887- qui mourra justement de froid et d'épuisement à proximité de la Caverne. Ce sont aussi de redoutables chasseurs de cabris, -ou de vaches retournées à l'état sauvage-,comme ce personnage coureur des bois immortalisé par Mortier de Trévise, et reproduit par l'artiste Janet Lange - de son vrai nom Ange Louis JANET - 1815-1872 - que Mortier connaissait.
Emma est la jeune épouse du dessinateur. Le mariage a eu lieu en France, en 1860, quelques mois après la mort accidentelle du père d'Emma, Gabriel Le Coat de K/veguen en mars 1860. L'année suivante, les deux époux sont en voyage de noces à La Réunion. Emma retourne ainsi sur les lieux de son enfance, en particulier dans les Hauts du Tampon. Le volcan de Bourbon, vu du pas de Bellecombe, août 1861. ADR-40 Fi105- voir diapositive suivante . Emma est assise à droite, son mari et François de Mahy sont les deux observateurs sur le début de la crête conduisant au Nez coupé de Sainte-Rose. A la droite d'Emma, le promontoire rocheux, très étroit, semble être le "dyke" - conduit de cheminée volcanique- bien visible encore de nos jours dans le rempart menant au nez coupé du Tremblet.Un domestique noir, légèrement vêtu, attise le feu du casse-croute du matin. Le mois d'août est pourtant un mois hivernal, dans l'hémisphère austral.
Emma est la jeune épouse du dessinateur. Les deux époux sont en effet en voyage de noces à La Réunion, en 1861.
Valentine Elise Caroline Panchaud de Bottens, épouse de François Cézaire de Mahy, depuis 1854, est aussi la belle-soeur par alliance d'Emma Mortier de Trévise, née Le Coat de K/veguen: la soeur de François Cézaire a épousé le frère d'Emma. On remarque que l'excursion se fait en famille, et que les jeunes femmes - Valentine ayant 25 ans et Emma, 26 ans, n'hésitent pas à se lancer dans une longue randonnée de plusieurs jours: à cette époque, la piste praticable à dos de mules s'arrêtant, d'après François de Mahy, à la Plaine des Cafres, au niveau de la Porte de la Ravine Blanche. A partir de là, tout le trajet - plus d'une douzaine d'heures aller - se fait à pied uniquement, sur un terrain difficile. Il peut donc paraître étonnant que les époux de Mahy amènent leurs fillettes dans une pareille entreprise. Mais il ne faut pas oublier par ailleurs que la deuxième moitié du dix neuvième siècle voit aussi naître l'engouement des classes sociales aisées pour la montagne, tout comme pour les joies balnéaires. Le jeune couple de Mahy fait figure ainsi de couple moderne.
Elle est l'épouse de François de Mahy
Photographie aimablement confiée par M. Perrin Le muret de pierres construit depuis au moins le dix-neuvième siècle a été régulièrement entretenu, pour se protéger des rigueurs du froid nocturne. L'expédition de 1861 a lieu au mois d'août, en plein hiver austral. Mais la saison est cependant meilleure pour être assuré d'un beau temps ensoleillé. C'est pourquoi la plupart des récits d'expéditions anciennes indiquent la période de l'hiver austral comme période favorable pour cette entreprise. La famille de Mortier de Trévise fait de même. Pour ce qui concerne les conditions topographiques: Le Piton de la Fournaise : un volcan très actif, " haut lieu " du patrimoine réunionnaisLe Piton de la Fournaise est un des volcans les plus actifs du monde. Il se situe à l'est de l'île de la Réunion, qui se trouve dans le...geoimage https://geoimage.cnes.fr/fr/geoimage/le-piton-de-la-fournaise-un-volcan-tres-actif-haut-lieu-du-patrimoine-reunionnais
Rosa débouche une bouteille de vin, indispensable pour se réchauffer à 2360 mètres d'altitude. Est-elle une servante, chargée des victuailles, comme sa voisine de droite? Pour celle-ci, son mouchoir de tête confirme son statut. Le doute demeure pour Rosa. A l'intérieur de la caverne, subsistent de petites niches aménagées dans la paroi du fond, destinées sans doute à abriter des provisions peu périssables et de quoi cuisiner. Intérieur de la caverne des Lataniers, photographie Maloyab, 2023
Rosa débouche une bouteille de vin, indispensable pour se réchauffer à 2360 mètres d'altitude
Cet autoportrait figure dans un album des oeuvres de Mortier de Trévise, conservé aux Archives Départementales de La Réunion -40FiEgo sum qui: Je suis l'auteur du dessin - il manque en effet le verbe latin delineavi, au parfait de l'indicatif, qui est sous-entendu. Le matériel de dessin d'Hippolyte Mortier est posé à sa gauche dans une gibecière rectangulaire.
Ego sum qui: Je suis l'auteur du dessin - il manque en effet le verbe latin delineavi, au parfait de l'indicatif, qui est sous-entendu. Le matériel de dessin d'Hippolyte Mortier est posé à sa gauche dans une gibecière rectangulaire.
Le pied est une mesure encore utilisée au dix neuvième siècle: ici, cela fait une hauteur de 1, 20 mètre environ. On ne peut se tenir debout. L'auteur indique que la caverne peut abriter une quinzaine de personnes allongées pour y passer la nuit, avant la dernière étape pour atteindre les flancs du volcan actif, le Piton de la Fournaise, dont le sommet se dresse à plus de 2600 mètres au-dessus d'un enclos basaltique naturel.
La caverne est accessible sur un plateau basaltique, entre deux effondrements volcaniques. Cette zone froide et au climat rigoureux a longtemps servi de refuge aux noirs évadés des plantations, comme le dénommé Mauzac, chef de bande réputé pour son habileté à échapper aux chasseurs de Noirs. Le relief allongé du Piton des Feux à Mauzac sert de repère pour localiser la caverne.On trouve aussi le patronyme de Manzak, « roi » en malgache, qui est déjà repéré comme tel le 12 août 1754. Il est tué par le chasseur de Noirs, Dugain, en 1758. Manzak - Mauzac- avait succédé à un autre chef de marrons, Laverdure, réputé " « roi de tous les marons », tué au Bras de La Plaine en 1752. voir: Dans la nuit de l'esclavage, la lumière forte du maronage | Société de plantation, histoire et mémoires de l'esclavage à La RéunionDe la courte histoire de l'île de Bourbon-La Réunion, depuis son peuplement jusqu'à cette année 2018, 170e anniversaire de l'abolition de...Société de plantation, histoire et mémoires de l'esclavage à La Réunion Dans la nuit de l'esclavage, la lumière forte du marronnage
Hippolyte Charles Napoléon Mortier semble très amoureux: il signe ses croquis de voyage de son initiale N pour Napoléon et E pour Emma.
Carte extraite de La Réunion pittoresque, guide du voyageur, par Gustave Manès, 1913On y distingue les deux itinéraires empruntés par les voyageurs et les guides pour atteindre le Piton de la Fournaise: celui qui passe par l'actuel sentier Josémond Lauret, et un autre chemin, plus curieux, qui semble passer par la mi pente du Rempart de la rivière des Remparts, et rejoindre le cratère Commerson, à partir du nez de Boeuf, qui fut longtemps - jusqu'en 1965- le terminus de la route carrossable.La verticalité dangereuse du rempart en aval de la pente sud du cratère Commerson, jointe à un climat de montagne avec changement rapide de temps et de température- négative la nuit pendant l'hiver austral - devait rendre ce second parcours risqué, et dangereux.
Aquarelle de Hippolyte Charles Napoléon Mortier, de Trévise, ADR, 40Fi 105On reconnait Emma, née Le Coat de K/veguen, sur le rempart menant au Piton de Bert, à droite, et l'auteur- ?- avec François de Mahy, sur le promontoire à gauche, menant vers le nez coupé de Sainte Rose. A leurs pieds, deux domestiques noirs activent le feu pour le déjeuner. Une boîte rectangulaire intrigue: matériel de dessin de Mortier? Au nom de l'un de ses maîtres en dessin ou en aquarelles? L'indice donné par la présence du petit cratère Formica Leo montre que la vue est prise depusi le Pas de Bellecombe, en hommage au gouverneur contemporain de la découverte du passage. En réalité, c'est un esclave du nom de Jacob, accompagnant une grosse expédition de 25 personnes, pilotée par le guide Jean Dugain, en 1768, qui découvre le passage périlleux menant au fond de l'enclos Fouqué, avec 200 mètres de dénivelé vertical. Jacob faisait partie de la bande d'esclaves du Sieur François Justamond.
Extrait p. 270 -
La marche est fatigante malgré les distractions que présentent une nature inconnue et des points de vue nouveaux [...] Après avoir contourné la base du Piton de Sable qui domine l'encaissement de la Rivière des Remparts, nous arrivons à l'entrée dela caverne Latanier. C'est là que nous passerons la nuit. Il est midi. Nous avons marché cinq heures,toujours en montant. La caverne est située dans la plaine de Cilaos*. Je ne sais pourquoi on l'appelle caverne Latanier: à cette altitude (deux mille mètres) où la température est froide, aucun palmier ne pousse, le latanier moins que tout autre, car il a besoin des terres chaudes du bord de la mer.
Autour de l'île bourbon et de Madagascar,
Fragments de lettres familières, Paris, 1891
La randonnée de François de Mahy a eu lieu en 1854, les 14, 15 et 16 mai, à la suite d'une éruption volcanique visible depuis Saint-Pierre et tout le sud. * Cilaos- exactement CILNOS - est le nom que l'on trouve sur une carte de 1858, due à Alexandre Aimé de Vuillemain - 1812-1880- cartographe et éditeur installé à Paris, membre de la société de Géographie, pour laquelle il réalise, avec des amis, un Atlas des départements français et des possessions d'outre-mer. Vuillemain a voulu représenter avec précision les lignes de crêtes, le pas des sables appelé Plaine des Cilnos, avec le Piton des Feux à Mauzac à proximité.
La décennie 1850-1860 semble avoir été une période d'activité intense du Piton de La Fournaise. La curiosité attire plusieurs visiteurs, dont Louis HERY, qui a laissé une trace de son passage dans la caverne des Lataniers en 1854.
Antoine Roussin, Album de La Réunion: images provenant de l'Iconothèque Historique de l'océan Indien.Photographie: bilan de la DAC-OI, communiquée par M. Perrin.
Chaque visiteur se fait un devoir de laisser la marque de son passage dans ce lieu symbolique: les fouilles de l'INRAP ont ainsi répertorié une centaine de roches basaltiques gravées. Parmi ces graffitis, Pêle-mêle, on y retrouve les noms de :
- Louis HERY- 1801-1856 -, qui traduisit les fables de La Fontaine en créole. Il séjourne dans la caverne en 1853
- Vitry, qui y fit une halte en 1860
- Jacob de Cordemoy, l'année 1862
- Paul Hermann Frères, à la fin du 19e siècle...