Want to create interactive content? It’s easy in Genially!

Get started free

Galerie numérique : La parole est aux allégories

Lorenzo Lerias-Vieira

Created on September 26, 2025

Start designing with a free template

Discover more than 1500 professional designs like these:

Akihabara Agenda

Akihabara Content Repository

Interactive Scoreboard

Semicircle Mind Map

Choice Board Flipcards

Team Retrospective

Fill in the Blanks

Transcript

Merci de votre visite !

Retrouvez toutes ces oeuvres numérisées et de nombreuses autres au Musée de l'épistémologie historique, dans l'exposition "Nations ? Vos papiers s'il vous plaît !"

Quatuor des Nations Européennes : Hispania, Raphaël Sadeler (1561-1632)(date inconnue, estimée entre 1580 et 1632), reproduction dessinée de gravure

Cette œuvre sert cette galerie en offrant un regard sur les allégories nationales au XVIème siècle. A cette période, le mot "Nation" ne désigne pas encore le terme d'Etat Nation, lequel émergera au XIXème siècle. Hispania valorise deux personnages. Assisse à gauche, la femme semble incarnée une souveraine, avec autour d'elle des symbole de royauté. A droite, l'homme semble être un conquistador, à en juger par son armure, ainsi qu'au titre de cette œuvre censée incarnée l'Espagne. Aux alentours, une accumulation de symboles renvoie au plus grand des deux Royaumes Ibériques : le blason royal, un paon, des agrumes, des instruments de navigation. Ces derniers renvoient à la perception européenne de l'Espagne en cette époque : un royaume d'explorateurs et de navigateurs, d'où la présence d'un compas, d'une ancre de navire ou encore d'un globe. De même, le coffre débordant d'or à gauche de l'arbre central renvoie bien sûr au mythe de l'Eldorado. Le paon ou le blason situés en haut au centre de l'image renvoient eux à la royauté, tout comme la femme assise. Tout ces symboles ont globalement traversé le temps jusqu'à notre époque, et on peut en comprendre la signification aujourd'hui. Cependant, les autres allégories de nations représentées par Raphaël Sadeler (Francia) et son frère Joahn (Italia et Germania) utilisent des symboles qui nous parlent moins aujourd'hui. Nous vous invitons à les découvrir sur place, au musée, ainsi qu'à mettre cette information sous la perspective suivante : les allégories ne sont donc pas éternelles ! Elles dépendent avant tout du regard du spectateur et de leur capacité à traverser les âges.

Triomphe de la République, auteur anonyme, 1875, estampe Au centre de l'image, Marianne piétine une couronne. Le rouge de sa toge renvoie aux premières significations incarnées par cette figure allégorique, à savoir la Liberté, puis la République, régime qu'elle incarne ici. Au sol, on retrouve les autres courants politiques d'époque. A gauche en costumes colorés, les orléanistes qui tiennent la "charte" de Louis Philippe. A côté, avec un manteau bleu au fleurs de lys, les légitimistes. Au centre droit, Napoléon III, tombé au sol, tout comme son Empire quelques années auparavant. A droite enfin, des soldats avec casque à pointe : ce sont les Prussiens qui ont vaincu la France à Sedan en 1870. Tous les personnages au sol sont les ennemis de la République. En 1875, Marianne n'est pas encore allégorie de la France, mais seulement de la République. Sa figure est moquée par les opposants à ce nouveau régime. Pourtant au fil des décennies, la République va produire en masse des représentations iconologiques pour concurrencer celles des Monarchies et Empires Français. Cela finira par payer, puisque la Marianne de la République va peu à peu devenir la Marianne de la France. Sur cette estampe, le destin unificateur de la République est déjà une ambition. Dans la foule derrière Marianne, on voit ainsi de nombreuses classes sociales représentées. De même, les Anges entourant la figure de la République appellent à une lecture presque prophétique de ce triomphe, alors même que cette estampe fait seulement suite à des élections remportées par les Républicains, et qu'il reste donc de nombreux obstacles à la jeune Marianne républicaine pour devenir la Marianne de la France entière.

Une union dans l'intérêt de l'humanité - de la civilisation - de la liberté et de la paix pour toujours. Donaldson Litho Co (entreprise de lithographie),1898, poster.

Cette affiche réunie 4 allégories iconiques du monde anglo-saxon. Côté gauche, Columbia et l'Oncle Sam représentent les Etats-Unis, tandis qu'à droite, Britannia et John Bull incarnent le Royaume-Uni. Cette réunion est d'autant plus intéressante qu'elle rappelle que ces deux nations ont pu avoir non pas une, mais plusieurs allégories. A ce titre, le lion et l'aigle postés en haut du poster sont eux aussi emblèmes, respectivement, du Royaume-Uni et des Etats-Unis. Britannia et Columbia, assises ensemble sur un immense trône, sont inspirées de figures mythologiques, et renvoient à la grandeur symbolique de leur pays. John Bull et l'Oncle sont des personnages d'inspirations plus récente, qui émergent entre le XVIIIème siècle pour le premier, et le XIXème pour le second. Ils partagent, en plus de leur naissance plus récente, une esthétique réaliste, les rendant plus proches des simples citoyens américains ou britanniques. Là où en revanche, aucune femme des deux pays à cette époque n'est aussi émanciper que les figures allégoriques ici présentes. Ajoutons également que côté américain, l'Oncle Sam et Columbia ont à l'origine des significations un peu plus spécifique que celle d'allégorie nationale. Le vieil homme se popularise après la guerre de Sécession, incarnant le gouvernement fédéral, tandis que la déesse américaine était surtout d'actualité pour encourager la conquête de l'Ouest, dans les débuts du pays.

Alliance anglo-japonaise, Yamatohime et Britannia, issue du journal 時事新報 (Jiji shimpō), 1902, dessin de presse.

Ce dessin nous révèle le rôle important des allégories dans la construction identitaire nationale. Le Japon est érigé à égalité avec le Royaume-Uni. Les figures qui les incarnent (voir les point d'interaction) sont de véritables allégories, chargées de symboles, tirées de l'Histoire, ou du roman national de ces pays, et en font donc quelque chose de plus grand, à savoir une Nation. A l'inverse, les deux personnages enfantins, Corée et Mandchourie, n'incarnent que de simples personnifications de leur territoire. Aucun symbole ne leur est rattaché, ni l'ours mythologique ayant fondé la Corée, ni l'archer mandchou, pourtant longtemps craint en Asie par exemple. Cette absence place subtilement une hiérarchie entre deux "simples" pays, et deux Nations qui souhaitent les protéger, en étant elles décorées de symboles et de légitimité.

La Grèce sur les ruines de Missolonghi, Eugène Delacroix, 1926, huile sur toile 213 x 142 cm

Au milieu de ruines et sous un ciel noir, une femme ouvre les bras. Son visage, entre colère et désarroi, semble appeler le spectateur à la contemplation du chaos ambiant. Cette femme, habillée aux couleurs de la Grèce, et dans une tenue traditionnelle, a été conçue par Delacroix comme une allégorie du pays, qui, pendant sa guerre d'indépendance, se dresse en Nation pour chasser l'occupant ottoman. L'Empire ottoman est justement personnifié, non par une allégorie, mais par un simple soldat, au fond à droite. Son turban, sa peau sombre, son habit rouge et sa posture triomphante : tous ces éléments l'opposent à la clarté, au visage dégagé, et au bleu de la robe de la femme au centre de la composition. Tout comme la ville de Missolonghi, dont Delacroix a représenté les ruines, cette allégorie semble résiliente, comme si elle n'en était pas à sa première bataille, ce qui fut le cas pour la ville. Mentionnons aussi ce bras dépassant des décombres, subtil rappel à la mort et aux horreurs de la guerre, sans besoin de passer par la représentation allégorique de la Mort. A propos du style allégorique, ce dernier est plutôt délaissé lorsque Delacroix s'aventure dans cette peinture militante. Elle précède d'ailleurs une autre toile qui fera naître l'une des allégories les plus célèbres, La Liberté guidant le Peuple. Le pari d'une allégorie donne un aspect presque mythologique à la scène, et sert le désir de distinction et d'indépendance de la Grèce par rapport à son occupant. Un style réaliste, avec par exemple des civils, n'aurait pas retranscrit cet aspect symbolique de la lutte nationaliste.