Want to create interactive content? It’s easy in Genially!

Get started free

La pluie, Ponge

Anna Szymkiewicz

Created on March 17, 2025

Start designing with a free template

Discover more than 1500 professional designs like these:

Modern Presentation

Terrazzo Presentation

Colorful Presentation

Modular Structure Presentation

Chromatic Presentation

City Presentation

News Presentation

Transcript

La pluie, dans la cour où je la regarde tomber, descend à des allures très diverses. Au centre c'est un fin rideau (ou réseau) discontinu, une chute implacable mais relativement lente de gouttes probablement assez légères, une précipitation sempiternelle sans vigueur, une fraction intense du météore pur. A peu de distance des murs de droite et de gauche tombent avec plus de bruit des gouttes plus lourdes, individuées. Ici elles semblent de la grosseur d'un grain de blé, là d'un pois, ailleurs presque d'une bille. Sur des tringles, sur les accoudoirs de la fenêtre la pluie court horizontalement tandis que sur la face inférieure des mêmes obstacles elle se suspend en berlingots convexes. Selon la surface entière d'un petit toit de zinc que le regard surplombe elle ruisselle en nappe très mince, moirée à cause de courants très variés par les imperceptibles ondulations et bosses de la couverture. De la gouttière attenante où elle coule avec la contention d'un ruisseau creux sans grande pente, elle choit tout à coup en un filet parfaitement vertical, assez grossièrement tressé, jusqu'au sol où elle se brise et rejaillit en aiguillettes brillantes. Chacune de ses formes a une allure particulière : il y répond un bruit particulier. Le tout vit avec intensité comme un mécanisme compliqué, aussi précis que hasardeux, comme une horlogerie dont le ressort est la pesanteur d'une masse donnée de vapeur en précipitation. La sonnerie au sol des filets verticaux, le glou-glou des gouttières, les minuscules coups de gong se multiplient et résonnent à la fois en un concert sans monotonie, non sans délicatesse. Lorsque le ressort s'est détendu, certains rouages quelque temps continuent à fonctionner, de plus en plus ralentis, puis toute la machinerie s'arrête. Alors si le soleil reparaît tout s'efface bientôt, le brillant appareil s'évapore : il a plu.

La pluie, Ponge

prose, 4 strophes
scène, spectacle
entrée en scène
personnification
La pluie, dans la cour où je la regarde tomber, descend à des allures très diverses. Au centre c'est un fin rideau (ou réseau) discontinu, une chute implacable mais relativement lente de gouttes probablement assez légères, une précipitation sempiternelle sans vigueur, une fraction intense du météore pur. A peu de distance des murs de droite et de gauche tombent avec plus de bruit des gouttes plus lourdes, individuées. Ici elles semblent de la grosseur d'un grain de blé, là d'un pois, ailleurs presque d'une bille. Sur des tringles, sur les accoudoirs de la fenêtre la pluie court horizontalement tandis que sur la face inférieure des mêmes obstacles elle se suspend en berlingots convexes. Selon la surface entière d'un petit toit de zinc que le regard surplombe elle ruisselle en nappe très mince, moirée à cause de courants très variés par les imperceptibles ondulations et bosses de la couverture. De la gouttière attenante où elle coule avec la contention d'un ruisseau creux sans grande pente, elle choit tout à coup en un filet parfaitement vertical, assez grossièrement tressé, jusqu'au sol où elle se brise et rejaillit en aiguillettes brillantes.
regard subjectif
adverbes modulateurs precisent perception auteur
conn. spatiaux
reprise titre dès le début
présent d'énonciation
antithèse
acteurs
gradation
Le soleil, dans le jardin où je le regarde briller, éclaire à des intensités très diverses. Au centre, c’est une chaleur douce (ou un rayon) continu, une lumière implacable mais relativement modérée, un éclat incessant sans violence, une fraction pure de l’astre incandescent. À peu de distance des murs de droite et de gauche, les rayons frappent plus fort, différemment. Ici, ils semblent concentrés dans un faisceau large, là plus diffus, ailleurs presque comme des éclats de cuivre. Sur des fenêtres, sur les rebords des murs, la lumière court horizontalement, tandis que sur la face inférieure des mêmes obstacles, elle se suspend en halos étincelants. Sur une étendue lisse d’un toit de tôle, le soleil s’étend en nappes dorées, scintillantes sous l'effet de légères ondulations et bosses dans la surface. De l’angle de la fenêtre où il se glisse à travers les rideaux, il éclate soudain en éclats d’or parfaits, tressés par la brise légère, jusqu’au sol où il se reflète en cristaux lumineux. Chacun de ses rayons a une puissance différente : chacun obtient un bronzage différent. Le tout vit avec intensité comme un enfant compliqué, aussi excité que agaçant, comme un feu de camp dont le créateur est parti laissant une masse de flamme en développement interminable. Laissant au corps une peau plus foncée, le pshit-pshit des crèmes solaires, les gros coups de soleil se multiplient et font mal à la tête comme une musique sans harmonie, sans agréabilité. Lorsque le vacancier s'est réveillé, certaines taches rouges quelque temps apparaissent à son insu, de plus en plus brulantes, puis toutes les vacances s'arrêtent. Alors si les nuages reparaîssent tout s'efface bientôt, la brillante sphère disparaît : il a brillé.