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JEAN RAPHAËL ET LEDEVIN CLAIRE

Les enjeux contemporains du marché du travail

Comment les entreprises, les travailleurs et les institutions peuvent-ils s’adapter aux mutations profondes du marché du travail contemporain ?

La notion de marché du travail est aujourd'hui admise dans l'ensemble des courants de pensée orthodoxes. Le marché du travail désigne le lieu de rencontre de l'offre et de la demande du travail et est à l'origine de la détermination de sa rémunétation. Néanmoins, si l'analyse qui en est faite variait jusqu'alors en fonction de postulats et de conceptions divergentes afin de concevoir une même réalité, nous pouvons observer depuis quelques années une véritable transformation de ce marché dont résultent de nouveaux défis et réclamant une nouvelle forme d'étude et de mesures.

Sommaire

9. Mondialisation

1. Numérisation et télétravail

7. Géopolitique

6. Transition écologique

5. Responsabilité de l'entreprise

4. Formation et apprentissage

3. Ubérisation de l'emploi

2. Automatisation et intelligence artificielle

Le télétravail est une nouvelle forme d'organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait pu être exécuté dans les locaux de l'employeur est effectué par un salarié hors de ceux-ci. Il constitue un enjeu contemporain quant à la thématique de l'emploi. Le télétravail a pour vertu de réduire les coûts de transaction liés au transport, à l'immobilier de bureaux, et aux interactions formelles. Formulée par Ronald Coase (1937) et Oliver Williamson, la théorie des coûts de transaction suggère que les entreprises choisissent leurs modes d’organisation en fonction des coûts liés à la coordination des activités. En outre, le télétravail peut être analysé sous le prise de la théorie du capital humain. Soumise en 1967 par Gary Becker, elle consent à considérer que le télétravail permet aux travailleurs d’optimiser leur temps et d’accroître leur productivité. En évitant les déplacements, les employés disposent de plus de temps pour se former ou investir dans des tâches à forte valeur ajoutée.

La numérisation du marché du travail conduit à une modification des enjeux de l'information avant et après l'emploi : Avant : Les employeurs ont accès à de nouvelles formes d'information sur le candidat. Après : Cela implique à la fois la nécessité de surveiller les salariés et la capacité de le faire. (coûts de surveillance)

Asymétries d'informations

L'usage du numérique permet un élargissement extrême de l'accès à l'information. Les agents ont donc accès à une plus large base de données en fournissant bien moins d'efforts leur permettant une comparaison à moindre coût. En plus de cet accès, les démarches sont simplifiées, ce qui permet de postuler à un plus grand nombre d'emploi. En conclusion, cela vient renouveler l'approche des théories du "Job Search" (Stiegler) car d'un côté la réduction des coûts de recherche incite à demeurer plus longtemps au chômage, mais d'un autre, la plus grande transparence de l'information devrait réduire cette période.

La numérisation devrait conduire en théorie à un meilleur appariement puisque les agents ont accès à bien plus d'informations sur les emplois. Cependant, sans parvenir à l'expliquer, les études empiriques démontrent que la révolution numérique n'a en réalité que très peu amélioré ce mécanisme.

Job Search

Appariement

Télétravail

Numérisation et télétravail

Solutions Il est probablement préférable de maintenir cette approche pour l'instant, car il s'agit pour le moment d'un risque qui ne se reflète pas encore dans les données chiffrées. Au niveau macroéconomique, il est ainsi possible qu'il y ait un effet de compensation. La croissance de la production, qui est engendrée par le surplus permis par la technique, entrainerait une hausse du niveau de l’emploi.

Index

Risque de chômage technologique La substitution du capital au travail conduit à une réapparition du risque de chômage technologique depuis les années 1990’. On observe en effet un ralentissement de la croissance de la productivité du travail tandis que celle du capital n'a de cesse d'augmenter. On constate donc un fort risque de perte de valeur des salariés sur le marché du travail par le développement de la concurence par l'intelligence artificielle.

Théorie du principal - agent Il est possible de faire un parallèle avec la Théorie du principal - agent (1976, Théorie de la firme, Jensen). En effet, il existe une divergence entre « volonté de l’intelligence artificielle » et celle de l’employeur, qui n’arrive pas nécessairement à obtenir ce qu’il souhaite. Il lui faut dès lors engager des coûts (experts, temps ...) afin que l'intelligence artificielle remplisse la tâche réclamée.

Automatisation et intelligence artificielle

L'ubérisation est la remise en question de structures économiques traditionnelles par la mise en relation directe des clients et des prestataires, via des plateformes numériques. La théorie des marchés bifaces, formulée par Jean Tirole et Jean Charles Rochet (2003), explique le fonctionnement des plateformes numériques comme des intermédiaires mettant en relation deux ou plusieurs groupes d’utilisateurs (ex. : chauffeurs et passagers sur Uber). D'autre part, les plateformes réduisent les coûts de recherche et d’appariement entre offreurs et demandeurs. La théorie de l’automatisation et de la "complémentarité", inspirée des travaux d'Acemoglu et Restrepo (2016), vient enrichir la réfléxion sur l'ubérisation de l'emploi. Cette théorie explore notamment comment les nouvelles technologies qui remplacent ou complètent le travail humain. Les plateformes automatisent des tâches comme la répartition des courses ou l’évaluation des performances via des algorithmes. Cela remplace partiellement des fonctions traditionnelles de gestion humaine, mais complète également certaines compétences humaines.

L'ubérisation de l'emploi présente de nombreuses menaces. En premier lieu, elle remet en cause le salariat comme norme. En effet, les prestataires sont enregistrés sous le statut de micro-entrepreneur, effectuent des "missions" (rémunérés à la tâche) : on parle alors de "revenu" et non plus de "salaire". La sociologue Sarah Abdelnour montre dans son étude Moi, petite entreprise. Les auto-entrepreneurs, de l'utopie à la réalité (2017), que ce sont souvent les employeurs qui imposent à leurs (potentiels) salariés l'installation sous le régime d'auto-entrepreneur. Il est alors question de "salariat déguisé" : les plateformes contournent les obligations liées au salariat (cotisations sociales, congés payés) en classant les travailleurs comme auto-entrepreneurs, bien qu'elles exercent souvent un contrôle sur leurs activités (algorithmes, tarification). De ce statut résulte une précarisation : les indépendants "ubérisés" ne bénéficient pas des protections attachées au statut de salarié. À cet égard, Guy Standing a formulé la théorie de la précarisation (2017) qui analyse la montée des formes de tarvail précaires et flexibles. Le travail sur plateforme est souvent présenté comme flexible, mais il est marqué par l'absence de protection sociale, de contrat stable et de droits syndicaux. Cela crée une nouvelle catégorie de travailleurs vulnérables. Cette ubérisation connaît en outre des dérives : des entreprises telles qu'Uber Eats ou Stuart, exploitent des migrants en toute illégalité. Ils sous-louent à ces sans-papiers leur compte. En échange, ils récupèrent 30 % à 50 % de leurs recettes.

Index

Menaces
Concept

Ubérisation de l'emploi

Formation continue, réponse à l’obsolescence des compétences Richard B. Freeman soutient que, dans une économie mondialisée, les individus doivent constamment adapter leurs savoir-faire pour rester compétitifs. Il souligne cependant que l'accès inégal à la formation continue peut exacerber les inégalités sur le marché du travail. D'un autre côté, Acemoglu et Restrepo (2018) montrent que, certes les technologies remplacent certaines tâches humaines, mais elles créent une demande pour des compétences complémentaires. La formation continue est donc essentielle pour aider les travailleurs à se reconvertir d'une activité à l'autre.

Index

Apprentissage Les qualifications requises sur le marché du travail évoluant de plus en plus rapidement, l’apprentissage offre une adaptation directe aux besoins des entreprises, réduisant ainsi les décalages entre les qualifications acquises et demandées. Cela permet donc d'améliorer structurellement la situation du chômage sur la courbe de Beveridge en luttant contre les problèmes d'appariement. En outre, Gary Becker (1964), dans sa théorie du capital humain, souligne que l'apprentissage permet de développer des compétences spécifiques à une entreprise tout en accroissant les compétences générales, ce qui est à la fois profitable pour l'entreprise et le salarié.

Changements d'emploi fréquents Pour Armin Falk et Ernst Feh, les individus peuvent être réticents à se reconvertir ou à changer de domaine par peur de l'incertitude. Cependant, aujourd'hui, non seulement les agents changent plus d'emploi par des évolutions sociologiques, mais cela peut également s'expliquer par une accelération de la "destruction créatrice". Enfin, Autor et Dorn montrent que la disparition des emplois routiniers pousse les travailleurs vers des secteurs différents.

Evolution de la formation

Il est aussi pertinent d'analyser, sous le prisme de la théorie des coûts et bénéfices (inspirée par la microéconomie), la RSE comme une stratégie d’investissement. Les entreprises adoptent des pratiques socialement responsables si elles estiment que les bénéfices (réputation, fidélité des clients, attraction des talents) excèdent les coûts (mise en conformité, investissements écologiques). Toutefois, cette approche peut réduire la RSE à une démarche opportuniste, sans véritable transformation des pratiques. Enfin, dans leur théorie des avantages compétitifs (2006), Michael Porter et Mark Kramer ont proposé l'idée de Creating Shared Value (CSV), selon laquelle les entreprises peuvent simultanément créer de la valeur économique et résoudre des problèmes sociaux. Autrement dit, les entreprises intègrent les externalités sociales et environnementales à la chaîne de valeur. Les initiatives comme l’innovation durable ou l’inclusion sociale sont intégrées aux modèles d’affaires pour renforcer la compétitivité de l’entreprise.

Ban Ki-moon (ancien Secrétaire général de l'ONU) estimait que "La responsabilité sociale des entreprises (RSE) est la capacité des entreprises à intégrer les préoccupations sociales, environnementales et éthiques dans leurs activités et leur stratégie de base." En effet, la RSE va émerger dans les années 1950 avec pour objectif de répondre aux attentes des consommateurs et aux réglementations. Par exemple, on chiffre aujourd'hui en France l'existence de 14 labels relatifs au bien-être au travail. Cette RSE fait aussi tout à fait eccho aux recherches menées par Claudia Goldin, lauréate du prix Nobel d'économie 2023, sur la place des femmes sur le marché du travail. Formulée par Edward Freeman, la théorie des parties prenantes (Stakeholder Theory) affirme que les entreprises doivent répondre non seulement aux intérêts de leurs actionnaires, mais également à ceux de toutes leurs parties prenantes (employés, clients, fournisseurs, communauté, environnement). La RSE est donc un moyen de maximiser la valeur pour toutes les parties prenantes, et non uniquement le profit financier.

"La seule manière pour une entreprise de prospérer à long terme est de créer de la valeur pour toutes ses parties prenantes, et non uniquement pour ses actionnaires." - Edward Freeman

de l'entreprise

Index

responsabilité sociétale

Index

Le développement de la

Incitation de l'Etat

Compétences requises

Nouveaux métiers

Index

Transition écologique

Index

Désinflation compétitive

Monnaie unique et flexibilité du travail

Délocalisation

Importance d'une économie intégrée

Les impacts de l'intensification de la mondialisation

Index

Les événements géopolitiques ont un impact significatif sur le marché du travail. Nous nous intéresserons en particulier à trois d'entre eux, qui marquent tous la nécessité de repenser la souveraineté économique. 1- La crise du Covid Les restrictions sanitaires, les fermetures d'entreprises et les perturbations économiques ont entraîné une hausse massive du chômage, notamment dans des secteurs tels que le tourisme, la restauration, le commerce de détail et le transport. Les modèles hybrides combinant télétravail et présentiel sont devenus la norme dans de nombreux pays. Par ailleurs, les entreprises ont accéléré leur transition numérique, augmentant la demande de compétences technologiques. En outre, certains pays et entreprises ont cherché à relocaliser leur production pour réduire leur dépendance vis-à-vis des chaînes d'approvisionnement internationales. 2- La guerre russo-ukrainienne Certaines sanctions économiques ont incité des travailleurs qualifiés, notamment dans les domaines technologiques, à quitter la Russie. De nombreux travailleurs ukrainiens travaillant à l’étranger ont interrompu leur activité pour retourner défendre leur pays, perturbant des secteurs comme la construction ou l'agriculture. La guerre a perturbé les exportations clés comme le blé, l'acier et les composants industriels, affectant l’emploi dans des industries liées aux chaînes d’approvisionnement mondiales. Les entreprises des pays occidentaux ont alors cherché à réduire leur dépendance à des régions politiquement instables, entraînant des opportunités et des pertes d’emploi selon les régions. La guerre a notamment mis en évidence la dépendance européenne au gaz russe. Enfin, l’inflation mondiale due à la hausse des prix de l’énergie et des denrées alimentaires a réduit le pouvoir d’achat des travailleurs, augmentant la précarité dans de nombreux pays. 3- L'élection de Trump L’élection de Donald Trump en novembre 2024 a suscité des réactions contrastées sur le marché de l’emploi. Les premières analyses suggèrent que les marchés financiers, globalement optimistes, anticipent une relance économique par des mesures favorisant les entreprises, notamment des baisses d’impôts et des réductions de régulations. Cependant, certaines inquiétudes émergent, notamment sur l’impact potentiel d’une politique commerciale protectionniste, qui pourrait affecter des secteurs dépendants du commerce international et de la main-d'œuvre étrangère. Les effets concrets sur l’emploi nécessiteront davantage de temps pour se manifester pleinement.

Incertitude et contexte géopolitique

Le secteur de l'écologie engendre la création d'une grande part des nouveaux emplois actuels comme le démontre le graphique. Ils peuvent être directement liés à cet objectif ou seulement périphériques.

Nouveaux métiers

On observe un phénomène de destruction créatrice au sens de Schumpeter car d'anciennes branches de l'économie tendent à disparaitre (ex : la sidérurgie a diminué de moitié depuis les années 1970') au profit de nouvelles.

La création de nouveaux emplois pose nécessairement la question de l'appariement. Actuellement, 45 % des emplois dans le domaine écologique sont ceux d’ouvriers, tandis qu'ils ne représentent que 25% des emplois, tous domaines confondus. Cela permet donc d'offrir une opportunité pour tous. Néanmoins, nous observons désormais une hausse de la qualification requise dans ce secteur en raison de l’accelération technologique.

Compétences requises

L'importance d'une économie intégrée

- Taux de chômage aux USA bas car baissé avec la mondialisation car économie intégrée

Monnaie unique et flexibilité du marché du travail

Du fait de la monnaie unique, on ne peut plus jouer sur les taux de change donc on joue sur les salaires et la flexibilité des marchés du travail. En outre, l'ouverture de l'économie conduit dans les faits à une gestion individualisée de la RH, remplaçant les négociations collectives. On observe dès lors une diminution des salaires et de la qualité des conditions salariales et notamment un renforcement des disparités entre marché primaire et secondaire. Cependant, la mise en place d'un tel système pourrait conduire à une diminution du taux de chômage selon Calmfors et Driffill (1988).

L’intégration économique est le processus de mise en réseau et d'unification de systèmes économiques nationaux et des politiques économiques entre différents États. Une étude démontre que si le taux de chômage aux USA est bien moins élevé qu'en Europe, c'est parce qu'il a baissé par la mondialisation, du fait qu'il s'agisse d'une économie intégrée. En effet, cela semble s'expliquer par la hausse du facteur travail nécessaire afin de produire suffisament pour exporter. En outre, Jagdish Bhagwati indique que les travailleurs migrent vers les zones où leur productivité et leurs revenus potentiels sont plus élevés, ce qui est à la fois bénéfique pour le pays d'accueil et d'origine. Enfin, Paul Krugman souligne que cette intégration peut accentuer les inégalités sur le marché du travail en déplaçant les emplois des secteurs peu compétitifs vers les secteurs où les pays disposent d’un avantage comparatif (Ricardo). Cette mutation des activités peut alors être néfaste pour les travailleurs au niveau individuel mais est nécessaire pour le bien de la nation.

L'importance d'une économie intégrée

Désinflation compétitive

On constate un véritable impact du commerce avec les pays "à bas salaires" sur l'emploi dans les pays "avancés" (Berthaud P., Rocca M. 2000) Cela s'explique par le Théorème de Stolper-Samuelson (1941), continuité du modèle HOS, annonçant que l'ouverture de l'économie génèrerait l'augmentation des inégalités entre les travailleurs qualifiés et non qualifiés. En effet, le commerce avec les pays en développement engendrerait une baisse du prix des produits à forte intensité de main-d'œuvre, conduisant à une baisse de la rémunération des travailleurs non qualifiés dans les pays développés.

Délocalisation

Les délocalisations représentent la destruction de 9 à 12 millions d’emplois dans l’OCDE depuis 1970. En Europe, seul 52% des salariés ayant perdus leurs emplois dans des secteurs confrontés à une forte concurrence internationale sont réemployés, et qui plus est à un niveau de salaire inférieur (Raymond Torres, 2005). Il peut être intéressant de consulter l'avis de Mucchielli Les entreprises peuvent menacer de déplacer leurs opérations pour affaiblir les syndicats et réduire leur pouvoir de négociation, ne débattant non plus sur le salaire mais sur la potentielle délocalisation. David Autor et David Dorn (2013), montrent que la concurrence internationale affecte surtout les emplois manufacturiers, traditionnellement très syndiqués.

La transition écologique réclame de manière générale une incitation de l'Etat puisqu'il existe peu d'incitation privée, ce qui peut être rapproché de la notion de bien public. Cela s'exprime sur le marché du travail par une orientation et le financement des études dans un objectif environnemental ainsi que par la réglementation. On peut par exemple noter la mise en place d'un plan national de mobilisation pour les emplois et les métiers dans l’économie verte en 2009 ou celle de négociations collectives environnementales dans les grandes entreprises depuis 2021.

Incitation de l'Etat