Mano a Mano

Mano a Mano

Mano a Mano est un court-métrage de 23 minutes, réalisé par Louise Courvoisier en 2019. Les personnages principaux sont Abby et Luca, un jeune couple italien d’acrobates. Luca, joué par Luca Bernini est physiquement grand et fort et Abby jouée par Abby Neuberger est plus fine et petite.

Mano a Mano plonge le spectateur dans l’intimité d’Abby et Luca. Leur vie semble centrée autour du cirque comme nous le montre les premières scènes avec l’arrivée directe dans le mouvement et la préparation du spectacle et dès les premiers instants leur univers est marqué par une tension palpable. Lors d'une représentation Luca impose une figure a la jeune femme, en émettant une pression sur elle à l'aide du public, qu’elle ne se sent pourtant pas prête à accomplir. Cette tentative de figure mènera à un échec et marquera une rupture de confiance qui s’installera progressivement entre eux. N'arrangeant pas les choses, Luca lui fera comprendre que c'est de sa faute car d'habitude ils y arrivent.

On constate que leur relation de couple n'est pas très saine entre domination, consentement, charge mentale et rivalité, les problèmes s'accumulent. C’est alors que les péripéties s'enchaînent, reflétant les défis auxquels le couple est confronté. La jeune femme est surchargée de responsabilités autant financières, relationnelles et professionnelles car Luca ne prend pas la peine de l'aider. Leur vie en

caravane devient le théâtre de leurs désaccords où Luca prend toute la

place dominant ainsi sa compagne. Abby n'hésite d’ailleurs à quitter la caravane afin de se ressourcer dans la nature, à se réfugier quand rien ne va plus.Cette liberté est d'ailleurs transmis grâce au plan large et aux couleurs plus vives contrairement à par exmple la scène dans leur caravane où les couleurs sont sombres et l'espace très restreint et opressant. Plus tard, lors de la scène à la station essence, Abby regarde les clefs de la caravane, cela nous fait comprendre qu'elle pense s'en aller, qu'elle a ce désir de liberté.

Plus tard avant une représentation, au cours d’un échauffement, la jeune femme se lancera dans un jeu séducteur avec un autre acrobate sous les yeux de son compagnon. Le rendant jaloux, elle éloignera d’avantage les deux protagonistes. Mais au-delà de ça, chaque geste semble chargé d’incompréhension entre les deux personnages, ils ne se comprennent plus. Apres n’avoir finalement décidé de ne rien faire quant à l’autre acrobate, Abby et Luca font leur numéro à nouveau, et, contrairement au début du court-métrage, la sensualité semble présente. Luca ne contrait plus sa partenaire et la laisse venir vers lui. Abby l’accepte et restaure leur complicité en réalisant la figure à laquelle elle se sent maintenant prête. Elle sourit enfin. La situation finale reste ouverte mais tout de même avec une perspective positive quant à l’avenir de leur relation.

La réalisatrice, Louise Courvoisier, veut montrer la réalité, que ce soit positif ou négatif, au sein d’un jeune couple d’artistes. Les premières minutes du film sont importantes pour placer le décor et on comprend alors que leur couple va mal et qu’il y a une relation de dominé/dominant où la femme est clairement inferieure. Ce court-métrage peut nous permettre aussi de nous interroger sur le rapport homme/femme que ce soit dans la sphère professionnelle ou amoureuse mais aussi les doutes : va-t-elle choisir de partir ou de rester dans son quotidien ? ; et les difficultés qui s’instaurent autant dans leur couple qu'au sein de leur travail.

Un des procédés qu'elle utilise est le scope. Le scope est un format d'image large, popularisé dans les années 1950. En effet, on remarque que son utilisation est très contradictoire lors de la plupart des scènes. Celles-ci étant principalement verticales (équilibre, camping-car), cela renforce l'inconfort de la situation. On remarque aussi tout au long du court-métrage, de longs moments sans dialogues. La communication étant très peu présente, ce sont de longs blancs qui comblent les vides projectant de la même manière une situation d'inconfort.

Dans Mano a Mano la question d’équilibre est omniprésente. Elle est explorée à travers différentes dimensions offrant un portail complexe des relations humaines et des défis auxquels nous pouvons être confrontés dans la vie. Tout d’abord, physiquement le couple incarne l’équilibre à travers leurs performances acrobatiques. Celles-ci d’abord fragiles au début avec une chute et des incertitudes lors de leur numéro puis harmonieuses et bien réalisées à la fin. Cette harmonie corporelle est cependant mise en parallèle avec leur équilibre émotionnel. Ce dernier est constamment menacé par les tensions et conflits internes. La dynamique entre Abby et Luca alterne entre confiance et méfiance, harmonie et dissonance.

Enfin, Mano a Mano explore aussi la stabilité personnelle des personnages en particulier celle d’Abby par exemple lorsqu'elle trouve un moment de liberté et de réflexion pour s’éloigner de son compagnon et se ressourcer dans la nature. Ce court-métrage prend l’équilibre pour thème central, transcendant les performances artistiques, physiques pour toucher les aspects émotionnels et personnels. Le titre même “Main dans la Main” symbolise une connexion, un équilibre entre les deux personnages.

On peut dire que Mano A Mano est un chemin de traverse car c’est d’abord une vision de plusieurs paysages. En effet, les décors naturels, tel que le champ dans lequel les deux acteurs principaux vivent, plongent le spectateur dans des espaces familiers et rassurants mais toujours avec une vue d’un œil cinématographique. De plus, on retrouve également des passages théâtraux avec des décors et la présence de l’art. Cela nous permet de nous plonger dans la vie du couple. C’est aussi un chemin de traverse avec la présence de l’art et des artistes du cirque itinérants qui se déplacent de villes en villes. Ainsi, la découverte de nouvelles personnes, de nouveaux paysages et lieux permettent de dire qu’il s’agit d’un chemin de traverse car toutes ces nouvelles choses ne sont qu’éphémères à chaque fois. Elles changent à chaque déplacement, ils ne vivent jamais les même choses et leur quotidien n’est pas stable.