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Estelle SENECHAL Sébastien BOUFFAULT Thérèse PUIG

WEBINAIRE du 22 mai 2024

Thierry METZ, l'écrivain de l'in(dé)fini

Plan du webinaire :

* L'analyse du thème du temps (et de quelques autres...) au sein de l'œuvre de Thierry METZ * Propositions d'activités pédagogiques

Comment échafauder la lecture d'une oeuvre intégrale poétique avec les élèves ?

Un journal intime + un recueil = un OLNI !

- L'évocation d'un métier qui parle aux élèves (Cf. Arthur Lochman, La Vie solide : la charpente comme éthique du faire, Payot, 2019)- Une œuvre singulière à mi-chemin entre journal intime et recueil poétique - La simplicité et la profondeur des poèmes - Un auteur pas comme les autres...

Thierry METZ (1956-1997)

* Ecrivain autodidacte (livres achetés chez Emmaüs) * Travaux de manœuvre sur des chantiers et périodes de chômage durant lesquelles il écrit. * 20 mai 1988, décès de son fils fauché par une voiture et Prix Voronca pour son recueil Sur La Table inventée * Dépression et alcoolisme. Suicide en HP

Thierry METZ

Bibliographie

Bibliographie (*)

LES POETES ET LES METIERS MANUELS - Robert LINHART, L'établi, 1978 - Mattia FILICE, Mecano, POL, 2023 - Arthur LOCHMAN, La Vie solide, Payot, 2019 - Joseph PONTHUS Joseph, A la ligne, La table ronde, 2019 ESSAIS / ARTICLES - SH N°239 juillet 2012 - Paul MORAND, Eloge du repos, 1937 ; Carl HONORE, Eloge de la lenteur, 2004 FILMOGRAPHIE - Guillaume METZ, Dans l'ici d'un homme, 2021 - Marie Violaine BRINCART, L'Homme qui penche, 2020

Partie 1 : Analyse du thème du temps dans l'œuvre

I) LE TEMPS COMME STRUCTURE DU RECUEIL

Journal intime (du 16 juin au 21 novembre août 1990) Premier poème : "L'agence de travail temporaire m'a trouvé un emploi dans une coopérative ouvrière" Dernier poème :" Le gros oeuvre est terminé. On n'a plus qu'à ranger les outils dans la barraque et partir. Demain on commence autre chose" = Le recueil couvre la mission d'intérim

Un journal intime incomplet

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II) UNE ECRITURE AU SERVICE DU RYTHME

Inégalité de la longueur et de la forme des poèmes

Calligramme (page 88)

haïku (page 89)

Qui pilote la brouette ? Moi ? Ou mon rire ?

Ahmed Manuel Rodriguez Antoine...On pourrait jouer à la marelle ? Le CIEL Voici le plan : Le CHANTIER La TERRE - Le premier qui arrive se change en arc-en-ciel, d'accord ?

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Une ponctuation abondante

... ou absente

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Un style d'écriture simple mais poétique

* Rarement complexes

* Des phrases simples, souvent nominales.

* Des mots-valises : "passant-crotale" * Des assonances : ": « Dans l'infini du chantier. ici où rien n’est jeté » * Des métaphores : "le coquelicot noir" ; "l'arc-en-ciel de ma soif" * Des personnifications...

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III) UNE TRIPLE CONCEPTION DU TEMPS

* Un temps qui s'écoule lentement * Un temps à l'arrêt * Une conception cyclique du temps (épanadiplose)

« Par étapes, lentement. On avance » (p 33) « Pas moyen d’avancer. Le chantier reprend tout. » (p. 43) « quelque chose se fait, se défait. Souterrainement « (p. 43)

« De quel temps parle-t-il ? De celui qu’on ne voit jamais ou de l’autre, ouvert à tous ? D’une naissance ou d’une mort ? » (p. 38)

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IV) AUTRES THEMES POUVANT ETRE ASSOCIES AU TEMPS :

La verticalité du monde

échafaudage

LE CIEL (l'arc-en-ciel, les oiseaux, les nuages, les cimes des arbres, les feuillages, l'architecte, un dieu...)

LE CHANTIER (Les travailleurs, les outils, le chef, la routine)

LA TERRE (les éléments, la pénibilité, la routine, les mains, les outils)

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Le thème de l'égarement

Le manœuvre est comparé à un nomade perdu dans le désert ou à un capitaine :

« le manœuvre doit […] faire le tour, se perdre » (p. 17) à la recherche d'une « île n'existe pas encore sur la carte, nul parmi nous ne peut crier "Terre !". la vigie qui nous égare a dressé un bûcher là-haut dans sa nacelle. » (p. 72)

L’égarement est aussi une nécessité salvatrice. « Je n’avais pas besoin d’aller loin pour me perdre. Inutile. Comment s’éloigner d’un univers où l’être ne meurt pas ? / Je voulais marcher, c’est tout. Sortir un instant de ces besognes qui n’écoutent pas ce que nous sommes » (p. 77)

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Le langage, le silence comme expression de l'humilité

« ça ne sert à rien de parler aux gens, ils ne t’écoutent pas » (p. 87)

LE CIEL

les mots ont du sens : monde de l'intelligible

Le rire est le seul moyen d’exprimer quelque chose : « Pourquoi soudain, en plein effort, ce rire fou, qui nous montait des mains comme un oiseau grimpeur » (p. 63)

LE CHANTIER

communication limitée, voire impossible : les mots = les outils

LA TERRE

les mots = la mémoire = un protolangage

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L'absence et l'indéfini

* Une négation omniprésente * L'incertitude constante, l'approximation * Un narrateur qui tend à disparaître, doutant de sa légitimité à écrire

« On dirait qu’il n’y a personne, que personne ne viendra aujourd’hui. Les pas qu’on entend ne vont nulle part » (p. 45)

« deux ou trois hommes, des sourciers peut-être. On ne sait pas » (p. 25)

« Le manœuvre n’est qu’une trace. Qu’il suit » (p. 72) « j’habite un monde sans trace et seule reste la mémoire de mon souffle ». (proverbe touareg)

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La force créatrice : le désir d'écrire plus fort que tout

"J’écris dans une ortie, pas dans une rose " (P ; 73). Alors, il accepte de « jouer l'idiot, être à [sa] façon celui qui ne sait pas, devenir sourd et muet pour aller jusqu'au livre » (p. 22).

« C’est signe d’écriture ce qui tombe de l’arbre. / Au manœuvre de le ramasser. Sans attendre. Sinon comment saurait-il que l’oiseau donne forme à ses mains ? à ce qu’il touche ? »

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Thierry METZ (1956-1997) et l'écriture

"Le travail du poète consiste à soigner les moments de cette vie qui souffre de notre manque d’attention et d’amour. Le pays de Thierry Metz est simple, vertical, concret et métaphysique. Son lexique est celui d’un homme qui sait manier les outils ; sa métaphysique est d’un homme qui se salit les mains, pousse une brouette, monte sur un échafaudage [et dont] les mots partagent la manne secrète d’une autre façon d’être dans le chantier de la création" Yves Leclerc in Etudes, Revue de Culture contemportaine, numéro 4294, juin 2022

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Partie 2 : PROPOSITIONS D'ACTIVITES PEDAGOGIQUES

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Problématisation de l'œuvre

Cadence et rythme de la construction : Quels temps pour lui ?

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Questions préalables...

Lecture (synchrone / asynchrone/mixte) Approche linéaire / approche thématique Etude de la biographie (avant / pendant / après)

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Quelques pistes pédagogiques...

Nécessité d'une lecture à voix haute car œuvre poétique, possibilité de faire intervenir Lionel MAZARI, poète français ayant interprété des poèmes de Thierry METZ (Cf. chaîne YouTube) Nécessité de la recherche de plaisir : beauté des images (figures de style), sublimification du geste de l'artisan, sobriété du verbe mais profondeur du message... Donner la priorité à une lecture subjective (réaction à chaud) avant toute analyse distanciée (action à froid) Devant l'incomplétude de cette oeuvre, l'élève devient un lecteur actif qui participe à créer du sens (imagination, "horizon de lecture", travail sur les ellipses narratives) Donner l'envie aux élèves d'écrire leurs propres textes s'appuyant sur une expérience (professionnelle, éducationnalle, personnelle...). Mise en avant de l'apparente simplicité de l'écriture metzienne

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PREMIERE PARTIE AU FIL DE LA LECTURE

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MODULE 1 : Différents points d'entrée dans le livre

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Analyse des premières de couverture (*)

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Analyse de la préface (*)

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Un récit ? (*)

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MODULE 2 : Journal de lecteur

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Un calendrier thématique

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Un glossaire

Enrichir l'anthologie d'un glossaire reprenant les mots chers à l'auteur. ETAPE 1 : Lors des lectures individuelles, repérer des mots à forte occurrence dans l'oeuvre ETAPE 2 : Répartir ces mots par élèves ou groupes d'élèves ETAPE 3 : Les élèves tentent d'en donner une définition en s'appuyant sur le texte mais aussi sur des impressions personnelles (hypothèses) ETAPE 4 : Restitution et débats interprétatifs autour de ce lexique Exemple de mots / groupes de mots pouvant faire partie du glossaire : ARC-EN-CIEL : DOLMEN : ECRITURE : OISEAU : MAINS : COLERE NOIRE DU COQUELICOT :

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Un journal de lecteur (*)

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MODULE 3 : Journal dialogué et autres exercices en interaction

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DEUXIEME PARTIE ANALYSE DE L'ECRITURE

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MODULE 1 : Manoeuvre et poète ?

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Thierry METZ : manœuvre ou poète ?

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La vie de chantier (*)

ETAPE 1 : Neuf extraits du Journal d’un manœuvre figurent pêle mêle sur une feuille A3ETAPE 2 : Les élèves tentent en binôme de constituer des corpus en organisant les textes autour de trois thématiques (le métier (travail) / le chantier (lieu) / les jours de repos...) / Ils remplissent le tableau dans lequel les thèmes apparaissent déjà. ETAPE 3 : Ils formulent des questions et essaient d'y répondre ETAPE 4 : Ils soumettent leur travail au professeur pour validation puis transmettent leur travail à un autre binôme

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MODULE 2 : Analyses comparées

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Metz, Ponthus : deux poètes ouvriers

Metz, Ponthus : deux poètes ouvriers (*)

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MODULE 3 : Le temps de l'écriture

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Un style simple mais rythmé

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Une ponctuation au service du temps

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MODULE 4 : Productions d'élèves

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Des formes poétiques traditionnelles

A la manière de Thierry Metz, composez un poème relatif au stage en entreprise que vous aurez effectué.

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Des interprétations originales pour faire vivre les textes

Créer un support audiovisuel (BookCreator) associant un texte poétique lu à haute voix à une photo qui l'illustre. Ajoût possible de musique, effets sonores etc.

Comme dans le film de Guillaume METZ, Dans l'ici d'un homme (2021), mettre en dialogue certains passage du recueil

Ecrire une lettre aux descendants de Thierry Metz ou un article destiné à être publié dans une revue littéraire...

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Des expositions (*)

Créer un espace d'exposition avec des objets connectés en atelier (atelier "gros œuvre", CDI...) avec des QR-code, renvoyant à des textes de METZ lus par les élèves.

Créer un musée virtuel à l'aide du logiciel ARTSTEPS avec des repères biographiques de l'auteur, des textes, des dessins ou des photos y faisant écho

Concours de la meilleure photo en situation professionnelle en se positionnant sur l'une des thématique du recueil : la création, la verticalité, l'égarement, une réflexion sur le temps pour soi

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Portaits photographiques

Réalisation de portraits photographiques d'élèves en situation professionnelle

Il s'agira de donner une dimension poétique à ce portrait

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MODULE 5 : EVALUATIONS

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Exercice d'écriture au choix :Sujet 1 : Comme l'affirme Emilie Gouëzec dans son article, pensez-vous que l'homme peut prolonger sa propre existence ? Sujet 2 : Pensez vous que l'on soit condamné à subir le temps qui passe ?

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A méditer

"Tout objet technique nécessite pour être fabriqué un savoir-faire. Celui-ci est d'abord étranger à l'apprenti, qui par la répétition des gestes l'intériorise sous la forme d'habitus. En apprenant à faire un mur, l'apprenti maçon intériorise ce qu'il mettra en oeuvre en tant qu'artisan. Dire qu'il connaît le métier veut dire qu'il peut monter un mur selon les règles de l'art. Devant l'oeuvre, en revanche, l'artiste n'est pas tout à fait dans la même situation. Qu'il le sache ou non, il ne produit pas un objet qu'il sait faire, mais justement ce qu'il ne sait pas faire, ce qui n'appartient pas à son habitus. Plus précisément, il apprend, pour une prochaine fois qui n'aura jamais lieu, à faire l'oeuvre qu'il n'a pas encore créée par les gestes qui lui donnent naissance. Il est en train d'apprendre à faire une oeuvre qu'il ne connaît pas autrement que par cet apprentissage. [...] Ce serait à peine métaphoriser que de dire que c'est l'oeuvre qui a l'initiative. Mais ce serait une métaphore. En réalité, chaque geste de l'artiste anticipe une oeuvre qui vient vers lui parce qu'il la suscite. C'est cette anticipation effectuée qui se donne à voir dans l'exposition, dans la manifestation de l'oeuvre. [...] C’est pourquoi la jouissance esthétique consiste à plonger dans la transparence de l'origine, puisque c'est exactement ce que montre l'œuvre : aucune autre raison d'être qu'elle-même, aucune autre justification que d'être soi. Coïncidant avec son origine, se rendant absolument transparente à elle-même, l'oeuvre figure la chair, l'auto-affection s'éprouvant dans la présentation du monde, C'est pourquoi l'oeuvre peut être figurative. C'est l'énigme (souvent commentée) de Cézanne : « l'homme absent, mais tout entier dans le paysage »." Alain , système des beaux arts, 1920

Thierry METZ, L'Homme qui penche, Editions Unes Lignes, 1997

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