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EL 2 Gnathon

Camille Déruelle

Created on August 7, 2023

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Transcript

Explication linéaire n° 2 " Gnathon" La Bruyère, Les Caractères, livre XI, fragment 121

Explication linéaire n°2

Le texte

INTRODUCTION

1er mouvement

2eme mouvement

3eme mouvement

conclusion

Gnathon ne vit que pour soi, et tous les hommes ensemble sont à son égard comme s'ils n'étaient point. Non content de remplir à une table la première place, il occupe lui seul celle de deux autres ; il oublie que le repas est pour lui et pour toute la compagnie ; il se rend maître du plat, et fait son propre de chaque service : il ne s'attache à aucun des mets, qu'il n'ait achevé d'essayer de tous ; il voudrait pouvoir les savourer tous tout à la fois. Il ne se sert à table que de ses mains ; il manie les viandes, les remanie, démembre, déchire, et en use de manière qu'il faut que les conviés, s'ils veulent manger, mangent ses restes. Il ne leur épargne aucune de ces malpropretés dégoûtantes, capables d'ôter l'appétit aux plus affamés ; le jus et les sauces lui dégouttent du menton et de la barbe ; s'il enlève un ragoût de dessus un plat, il le répand en chemin dans un autre plat et sur la nappe ; on le suit à la trace. Il mange haut et avec grand bruit ; il roule les yeux en mangeant ; la table est pour lui un râtelier ; il écure ses dents, et il continue à manger. Il se fait, quelque part où il se trouve, une manière d'établissement, et ne souffre pas d'être plus pressé au sermon ou au théâtre que dans sa chambre. Il n'y a dans un carrosse que les places du fond qui lui conviennent ; dans toute autre, si on veut l'en croire, il pâlit et tombe en faiblesse. S'il fait un voyage avec plusieurs, il les prévient dans les hôtelleries, et il sait toujours se conserver dans la meilleure chambre le meilleur lit. Il tourne tout à son usage ; ses valets, ceux d'autrui, courent dans le même temps pour son service. Tout ce qu'il trouve sous sa main lui est propre, hardes, équipages. Il embarrasse tout le monde, ne se contraint pour personne, ne plaint personne, ne connaît de maux que les siens, que sa réplétion et sa bile, ne pleure point la mort des autres, n'appréhende que la sienne, qu'il rachèterait volontiers de l'extinction du genre humain.

Introduction

Problématique : Comment le portrait en action de Gnathon permet-il de peindre un "anti honnête homme" ?

L'auteur et l'oeuvre

L'extrait à l'étude

Mouvements du texte

1er mouvement

2e mouvement

3e mouvement

Un homme dont l'appétit insatiable s'étend au-delà du repas.

Portrait en action d'un égoïste glouton à table.

Le type de Gnathon brossé en une phrase.

texte

texte

texte

analyse

analyse

analyse

1er mouvement : Le type de Gnathon brossé en une phrase

Gnathon ne vit que pour soi, et tous les hommes ensemble sont à son égard comme s'ils n'étaient point.

Analyse du 1er mouvement

Idée : En une phrase, l'égoïsme de Gnathon est dépeint. - Le personnage est introduit par l'emploi d'une négation restrictive mettant en avant son égoïsme et associée à une construction qui oppose le singulier "soi" à une tournure plurielle hyperbolique "tous les hommes" renforcée par l'adverbe "ensemble". Une circonstancielle de comparaison avance l'idée que l'existence des autres est purement et simplement niée par Gnathon grâce à la négation totale. En quelques mots, LB nous présente un personnage égocentrique à l'égoïsme absolu et, s'agissant d'un type, la satire de ce trait de caractère humain va être réalisée.

Gnathon ne vit que pour soi, et tous les hommes ensemble sont à son égard comme s'ils n'étaient point.

2e mouvement : Portrait en action d'un égoïste glouton à table.

Non content de remplir à une table la première place, il occupe lui seul celle de deux autres ; il oublie que le repas est pour lui et pour toute la compagnie ; il se rend maître du plat, et fait son propre de chaque service : il ne s'attache à aucun des mets, qu'il n'ait achevé d'essayer de tous ; il voudrait pouvoir les savourer tous tout à la fois. Il ne se sert à table que de ses mains ; il manie les viandes, les remanie, démembre, déchire, et en use de manière qu'il faut que les conviés, s'ils veulent manger, mangent ses restes. Il ne leur épargne aucune de ces malpropretés dégoûtantes, capables d'ôter l'appétit aux plus affamés ; le jus et les sauces lui dégouttent du menton et de la barbe ; s'il enlève un ragoût de dessus un plat, il le répand en chemin dans un autre plat et sur la nappe ; on le suit à la trace. Il mange haut et avec grand bruit ; il roule les yeux en mangeant ; la table est pour lui un râtelier ; il écure ses dents, et il continue à manger.

Analyse du 2e mouvement

Idée : L'auteur illustre le trait de caractère annoncé par la description de son attitude à table avec des convives. - La gloutonnerie du personnage est déjà suggérée dans son nom puisqu'en grec "gnathon" signifie mâchoire. - Tournure négative montre un personnage insatiable, qui en veut toujours plus même lorsqu'il a la meilleure place à table, il lui faut encore en occuper trois : à nouveau antithèse entre le singulier du pronom personnel renforcé par l'adjectif "seul" et le pluriel d'une masse indistincte inexistante aux yeux de G. "autres" et plus les 2 CC "pour lui" vs "pour toute la compagnie" La répétition de tout dans le portrait insiste sur la démesure du personnage. Son égoïsme transparaît également dans sa façon de manger, il monopolise les plats : euphémisme de l'oubli : c'est sciemment qu'il ignore que d'autres auraient aimé manger. Son emprise s'étend sur la totalité du repas. - Tournure restrictive : englobe tout, réduit le monde à lui-même - Verbes pronominaux avec forme réflexive montre un personnage tourné vers lui-même - Gloutonnerie ridicule avec la redondance de "tous tout" : s'efforce d'ingurgiter tout comme un ogre. - Structure complexe de la phrase montre rapidité et enchaînement de ses actions, et l'anaphore de "il" présente un personnage qui s'étend partout, étouffe, écrase les autres tout en saturant l'espace du texte .

Non content de remplir à une table la première place, il occupe lui seul celle de deux autres ; il oublie que le repas est pour lui et pour toute la compagnie ; il se rend maître du plat, et fait son propre de chaque service : il ne s'attache à aucun des mets, qu'il n'ait achevé d'essayer de tous ; il voudrait pouvoir les savourer tous tout à la fois.

Analyse du 2e mouvement

Idée : Une avidité qui le rapproche d'un prédateur. - Les termes appartenant à la famille de "mains" insistent sur sa voracité : il se saisit de tout et l'idée de se servir dans les plats directement avec les mains rend la scène répugnante : on n'a pas envie de manger après lui. - Nombreux verbes d'action dresse le portrait d'un prédateur qui s'empare de tout en même temps sans rien laisser aux autres, idée du carnivore renforcé par le plat évoqué : les viandes. Il provoque à la fois l'inquiétude et l'écoeurement le plus total. - Les autres ne peuvent que se contenter des restes après le passage de l'ogre comme en témoigne le chiasme et la circonstancielle de condition. Même ce qui reste est associé à un déterminant possessif. On retrouve plusieurs occurences du verbe "manger" pour celui dont le nom le résume à la seule activité de dévorer - le repas mais aussi le monde...

Il ne se sert à table que de ses mains ; il manie les viandes, les remanie, démembre, déchire, et en use de manière qu'il faut que les conviés, s'ils veulent manger, mangent ses restes :

Analyse du 2e mouvement

Idée : Un homme répugnant et égoïste au point d'être déshumanisé - LB rentre ici complétement dans la caricature en utilisant de nombreux moyens de provoquer le dégoût. La négation partielle commence par montrer qu'il est impossible d'avoir encore de l'appétit lorsqu'on est attablé avec cet homme, l'idée est renforcée par le pléonasme qui insiste lourdement sur la sensation provoquée et l'antithèse entre ôter l'appétit/affamés et l'hyperbole associée au superlatif. - Des descriptions précises appartenant au champ lexical culinaire contribuent à accentuer ce dégoût face à un homme incapable de manger proprement, notamment le jeu sur le paronyme "dégouttent" : tomber en gouttes + réaction provoquée et la tournure impersonnelle "on le suit à la trace" : il est omniprésent à table, ne laisse aucun espace aux autres et d'ailleurs personne n'ose protester. -Tout le mouvement 2 est traversé par le polyptote du verbe "manger" sous toutes ses formes, l'insistance et la redondance est volontaire de la part de l'auteur. - On bascule vers la déshumanisation avec la comparaison de la table à un "râtelier", la cruauté qu'il inspire est également perceptible avec la mention des dents qu'il nettoye avant de se remettre à dévorer. - Tableau vivant du personnage en ogre qui met en évidence ses façons dégoûtantes à travers l'ouïe et la vue. Construction complexe de la phrase : les actions s'enchaînent, de plus en plus répugnante, folie gloutonne qui emporte tout et salit tout.

Il ne leur épargne aucune de ces malpropretés dégoûtantes, capables d'ôter l'appétit aux plus affamés ; le jus et les sauces lui dégouttent du menton et de la barbe ; s'il enlève un ragoût de dessus un plat, il le répand en chemin dans un autre plat et sur la nappe ; on le suit à la trace. Il mange haut et avec grand bruit ; il roule les yeux en mangeant ; la table est pour lui un râtelier ; il écure ses dents, et il continue à manger.

3e mouvement : Un homme dont l'appétit insatiable s'étend au-delà du repas.

Il se fait, quelque part où il se trouve, une manière d'établissement, et ne souffre pas d'être plus pressé au sermon ou au théâtre que dans sa chambre. Il n'y a dans un carrosse que les places du fond qui lui conviennent ; dans toute autre, si on veut l'en croire, il pâlit et tombe en faiblesse. S'il fait un voyage avec plusieurs, il les prévient dans les hôtelleries, et il sait toujours se conserver dans la meilleure chambre le meilleur lit. Il tourne tout à son usage ; ses valets, ceux d'autrui, courent dans le même temps pour son service. Tout ce qu'il trouve sous sa main lui est propre, hardes, équipages. Il embarrasse tout le monde, ne se contraint pour personne, ne plaint personne, ne connaît de maux que les siens, que sa réplétion et sa bile, ne pleure point la mort des autres, n'appréhende que la sienne, qu'il rachèterait volontiers de l'extinction du genre humain.

Analyse du 3e mouvement

Idée : Après le repas, LB nous décrit l'attitude de Gnathon en pulic - Son égoïsme qu'on croyait jusque-là réservé à la table par un excès de gloutonnerie est en réalité total et absolu. Il se fait maître de tout ce qui l'entoure, souhaite tout posséder et conserver.A nouveau formes pronominales réflexives qui insistent sur un personnage tourné vers lui-même et une négation restrictive qui montre un personnage qui ne fait pas de concession et ignore les autres. - Il apparaît comme un sans-gêne absolument partout, grâce au parallèle fait entre des lieux publics (sermon, théâtre) et le lieu le plus intime où il est donc normal de se sentir à l'aise (chambre) : Gnathon a la même attitude dans ces lieux. A nouveau, les tournures absolues et la négation totale insistent sur son emprise qui s'étend sur la totalité des lieux et personnes et sur son caractère excessif. - En plus de son égoïsme, le personnage est menteur, et prêt à jouer la comédie pour parvenir à ses fins comme le montre la circonstancielle de condition.

Il se fait, quelque part où il se trouve, une manière d'établissement, et ne souffre pas d'être plus pressé au sermon ou au théâtre que dans sa chambre. Il n'y a dans un carrosse que les places du fond qui lui conviennent ; dans toute autre, si on veut l'en croire, il pâlit et tombe en faiblesse.

Analyse du 3e mouvement

Idée : Individualisme de Gnathon à l'hôtellerie - Nouvelle situation servant à illustrer le type de l'égoïste introduite par la circonstancielle de condition. On y retrouve l'opposition entre la masse indistincte plurielle que représente les autres "plusieurs" et Gnathon à travers l'anaphore poursuivie du pronom personnel "il" - L'exagération avec les emplois absolus et l'hyperbole renvoyant à la main, se poursuit pour montrer l'emprise total de cet homme sur tout ce qui l'entoure et qu'il s'approprie : personnes comme objets. On le voit notamment avec le nombre important de formes possessives. -La répétition du superlatif meilleur(e) rappelle à nouveau l'égoïsme excessif de Gnathon. - Il ne s'attache qu'au matériel en écrasant les autres, il est réduit à des actions primaires et non intellectuelles : manger, dormir. Grâce à l'accumulation des situations proposées par ce portrait en action, on découvre un personnage purement odieux. Il est mis en scène dans des situations mondaines du XVIIe et en transgresse impunément les codes en s'opposant farouchement au modèle de l'honnête homme qui est supposé se montrer humble, modéré, discret, capable de s'adapter à son entourage pour se rendre agréable à lui.

S'il fait un voyage avec plusieurs, il les prévient dans les hôtelleries, et il sait toujours se conserver dans la meilleure chambre le meilleur lit.Il tourne tout à son usage ; ses valets, ceux d'autrui, courent dans le même temps pour son service. Tout ce qu'il trouve sous sa main lui est propre, hardes, équipages.

Analyse du 3e mouvement

Idée : Négation de l'existence du reste de l'espèce humaine : point culminant du type de l'égocentrique. -Le portrait se termine sur une anaphore négative (comportant toutes les formes de négation : totale, partielle, restrictive) qui montre une dernière fois que les autres ne comptent pas et n'existent pas pour lui, ils sont purement niés. L'idée est renforcée par la présence d'antithèses qui montrent à nouveau Gnathon seul contre tous dans une attitude opposée à ce que l'on attendrait normalement de lui s'il respectait l'idéal de l'honnête homme. - Seule sa santé l'intéresse, comme le prouvent les formes possessives LB présente l'excès absolu dans le point culminant du portrait : il est prêt à sacrifier toute la race humaine pour ne sauver que lui. La fin du portrait renvoie à la phrase initiale " Gnathon ne vit que pour soi, et tous les hommes ensemble sont à son égard comme s'ils n'étaient point. " avec le groupe nominal "genre humain"/tous les hommes ensemble opposé à des formes au singulier désignant Gnathon et le possessif soi/la sienne, la négation totale "n'étaient point"/extinction. - Thème cher à la LB : la peur de la mort et même à ce stade, il est égoïste à l'extrême, l'adverbe "volontiers" insiste même sur le fait que le sacrifice serait effectué avec plaisir.

Il embarrasse tout le monde, ne se contraint pour personne, ne plaint personne, ne connaît de maux que les siens, que sa réplétion et sa bile, ne pleure point la mort des autres, n'appréhende que la sienne, qu'il rachèterait volontiers de l'extinction du genre humain.

Conclusion

BILAN ET REPONSE A LA PROBLEMATIQUE

Ce portrait caricatural en action présente un goinfre ridicule dont l'appétit vorace s'étend au-delà du repas et qui se fait possesseur de tout et de tout le monde en toutes circonstances. Toutefois, au-delà de la satire du type de l'égocentrique sans-gêne, La Bruyère en auteur classique cherche à dépeindre les hommes pour les corriger : il propose le portrait d'un anti-honnête homme qui ignore volontairement toutes les règles sociales afin de montrer l'importance de leur respect pour ne pas se comporter en glouton égocentrique et insupportable. C'est aussi l'occasion de réaliser une critique de l'aristocratie et de la mentalité des grands seigneurs qui, abusant de leur pouvoir, écrasent et dévorent tous les autres tels des ogres.

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