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Mon oncle. LV

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Created on November 23, 2020

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Transcript

Mon oncleJacques Tati, 1958

Jacques Tati

Né en 1907, il est mort en 1982. Il est réalisateur, acteur et scénariste. Son premier long métrage, Jour de fête, est tourné en 1947 mais ne sort en salles qu'en 1949. Avant la guerre, Tati, de passage à Saint-Nazaire, est séduit par la plage de Saint-Marc-sur-Mer. Il décide d'y revenir un jour pour tourner un film, ce sera Les vacances de Monsieur Hulot (1951-1952).

Mon oncle

Mon oncle est le premier film de Jacques Tati projeté en couleur. Il sort en 1958 et reçoit des prix en France et à l'étranger, notamment l'Oscar du meilleur film étranger. "Le dernier film de Jacques Tati, Mon oncle, l'emporte encore en perfection sur ces deux classiques de l'écran que sont devenus Jour de fête et Les vacances de Monsieur Hulot. En vous présentant la musique originale, naïve et gaie de ce ravissant chef-d'oeuvre, nous savons ce que nous faisons : nous vous offrons l'illustration sonore d'un film qui durera autant que les bandes immortelles de Chaplin... Et Tati est bien plus qu'un Chaplin français ; c'est un créateur original, un poète de la pellicule, un artisan aussi simple qu'il est bourré de talent. Tati c'est Tati : il ne ressemble à personne et il faudrait se donner bien du mal pour lui ressembler." Boris Vian, BOF Mon oncle, disques Fontana

Mon oncle est un film qui dénonce l’opposition de deux mondes : l’ancien et le nouveau, le moderne fonctionnel et froid contre le désuet déglingué mais chaleureux. D’un côté le vieux quartier où tout le monde trouve son compte, de l’autre, dans le quartier résidentiel ou dans l’usine moderne, des objets inutiles, des systèmes électroniques qui enferment les gens dans leur garage.

La chronologie fait apparaître 5 journées. Chacune correspond assez précisément à un acte, au sens classique du terme.

  1. Le premier expose le mode de vie des Arpel et celui de Hulot.
  2. Le deuxième voit une première tentative d'insertion professionnelle à la SDRC de Monsieur Hulot, soldée par un échec.
  3. Le troisième, un dimanche, poursuit le même objectif de normalisation mais dans la vie privée. Le but est d'engager Hulot à constituer avec la voisine un foyer sur le modèle des Arpel. Là aussi, c'est un échec.
  4. Le quatrième jour renouvelle, à l'usine Plastac cette fois, la tentative professionnelle. La catastrophe prend de l'ampleur avec l'affaire des tuyaux.
  5. Le cinquième jour tire les conséquences des échecs précédents et voit l'élimination définitive de M. Hulot, réfractaire à toute intégration.

Les décors

Hulot - Maison mystérieuse et chaotique, c'est une spatialité habitable dans laquelle l'imagination peut se déployer. - Accessoires très usuels. - Vélo solex.

Arpel - Maison moderne, géométrique à la beauté froide, sectorisée en endroits très définis. Les formes et les lignes y sont pures : cube, triangle, angle droit. Cet espace est habité avec d'infinies précautions, c'est lui qui régente ses habitants : la spatialisation asservit les hommes au lieu de les servir. - Suréquipement ménager, outils sophistiqués au rendement plus que contestable. - Grosse voiture.

Chez Hulot, l'immeuble est ancien, plutôt en référence aux impressionnistes. Il y a un côté zone qui rappelle les anciennes fortifications de Paris. Le quartier ressemble plus à un village qu'à une banlieue.

Chez les Arpel, les couleurs sont plutôt dans les gris, bleus, elles peuvent sembler agressives. La maison présente une référence aux cubistes, le jardin à Mondrian mais il est aussi dénué de goût. Toute fantaisie et toute idée de nature ont disparu.

Synthèse

- Le film présente un conflit entre l'homme et son environnement. - Chez Tati, ce conflit homme/décor devient le motif principal de la mise en scène. - Il pose la question du décor dans lequel on veut vivre : source de joie, bonheur, fantaisie ou produit dérivé industriel qui impose un mode de vie ? - Les Arpel vivent dans les décors des magazines. - La ville nouvelle se construit, le village de Hulot est en démolition. C'est un monde qui disparaît.

Le jeu

Le monde moderne, c'est donner à des adultes des jouets, des gadgets mais avec lesquels ils ne savent pas s'amuser. Dans l'univers de Mon oncle tout devient jouet, tout devient occasion de s'amuser.

Les sons

Dans le film, le son n'est pas naturel. Il n'y a pas de prise de son directe. Les répliques importent peu : même quand elles sont audibles, elles sont fades ou décalées, hors de propos ou surjouées. La vie luxueuse des Arpel est accompagnée de bruits stressants. Les bruitages couvrent une partie exagérée du spectre sonore. Le bruit du jet d'eau-poisson, ouvert lorsque des visiteurs huppés se présentent est associé à une certaine hypocrisie du monde de l'argent.

Le parcours des chiens

Scène d’exposition : le parcours des chiens qui passent d’un monde à l’autre (l’ancien et le nouveau). Ils sont vecteurs des deux mondes. Les chiens ont un rôle symbolique comme dans une fable. Ils font un parcours ensemble et ont le même comportement mais ils appartiennent à deux classes distinctes : d’un côté les bâtards (le peuple) et de l’autre le teckel qui porte un petit manteau : un chien de race appartenant et représentant les classes supérieures (ceux qui ont « réussi »). Après avoir quitté l’ancien monde, la « meute » va vers le nouveau. Le teckel rentre chez lui et les autres sont interdits d’entrée. Ils restent à la grille et regardent « tristement » dans le jardin. On note que l’ancien monde est difficile à dater : la charrette à cheval par exemple est plutôt anachronique en 1958.

Les parcours

Plusieurs scènes de parcours dans le film. Ce sont des parcours sinueux mais chacun a une signification différente. - Chemin en S dans le jardin de la maison moderne : sinuosité artificielle (projet du paysagiste : donner l’impression que le jardin est plus grand ?) et contrainte. Artifice et contrainte : dans le contexte d’un jardin très maîtrisé, géométrique, composé de petits carrés de graviers et d’arbustes taillés où chaque chose à sa place jusqu’à l’absurde.Les parcours du monde moderne sont fléchés. - Sinuosité du parcours dans l’immeuble de Monsieur Hulot : plutôt de l’ordre de la flânerie et du détour volontaire. On ne pénètre jamais dans cet immeuble qui est en réalité « impossible ».

Des signes, des lignes

Pour rappel, parmi les références présentées dans ce documentaire : - Jacques Lagrange (1917-1995) : co-scénariste de Tati, dessinateur de la maison des Arpel et de ses meubles, peintre de formation. - Henri Schmitt : décorateur du film Mon oncle. - Le Corbusier (1887-1965) : architecte, inventeur de l'Unité d'habitation à laquelle il travaille dans les années 20. - Robert Mallet-Stevens (1886-1945) : architecte et designer, appartient au mouvement moderne. - Claude Parent (1923-2016) et Paul Virilio (1932-2018): créateurs de "l'architecture oblique" (volume et sols en pente) - Charlotte Perriand (1903-1999) : architecte et designer.

Que peut-on retenir à propos de la maison des Arpel/la maison de Hulot ?

- Henri Gaudin : Tout est réduit à des images ou à des signes de modernité. Rien n'est à sa place. C'est une mascarade. Une modernité noyée dans le ridicule. On nous montre les signes des choses, non les choses elles-mêmes. - Jean Nouvel : La maison comporte des anomalies : petite cuisine et grande fenêtre par exemple. Cette maison lui fait penser au modernisme des années 20 : Le Corbusier et Robert Mallet-Stevens. Il évoque également le mobilier de Charlotte Perriand. Rien n'est à sa place. - Henri Gaudin : rien n'est à sa place. Les gens sont contraints. L'architecte a oublié que les habitants doivent marcher, déambuler. - Dominique Perrault : La maison de Hulot a une histoire et elle est inscrite dans un lieu (le quartier) ce que n'a pas et n'est pas la maison des Arpel.

-Jean Nouvel évoque aussi le pouvoir de représentation de la villa Arpel. - Rudy Ricciotti : Tati fait-il la critique de la modernité ? S'agit-il de se livrer à une critique sociale ? Quelle est la pensée de Tati ? - Jean Nouvel dit avoir pensé à Tati lorsqu'il a conçu la Fondation Cartier. Il évoque des modèles, les architectes Claude Parent et Paul Virilio. Tati a semé le doute chez les architectes : "ne pas faire du Tati". Il faut introduire de la vie (du désordre) dans cet ordre. - Andrée Putman et Macha Makeïeff : la maison des Arpel révèle une dimension ludique. Le désir de confort et d'onctuosité : le canapé-haricot (un banc traité comme un canapé ?). Les voitures stars qui glissent sur la route avec plaisir, en rang. "Des moutons heureux!" Les deux maisons : des terrains de jeu.

Quelle est la pensée de Tati ?

La maison des Arpel est ambivalente : quelque chose de vain, pas pratique mais un terrain de jeu. Un détail exemplaire de cette ambivalence : les lignes verticales (les rayures) omniprésentes dans les plans qui montrent la ville moderne.

Michel Pastoureau écrit dans L'étoffe du diable : "La rayure est fondamentablement une musica, au plein sens que le latin médiéval donne à ce terme extrêmement riche, bien plus riche que le mot français "musique". Comme la musica, la rayure est à la fois sonorités, séquences, mouvements, rythmes, harmonies, proportions. Comme elle, elle est mode, fluide, durée, émotion, de joie. Toutes deux partagent un vocabulaire commun : échelle, gamme, ton, degré, ligne, gradation, écart, intervalle, etc. Toutes deux , surtout ont un lien avec la notion d'ordre, qu'il soit classement ou commandement. La musique institue un ordre entre l'homme et le temps. La rayure institue un ordre entre l'homme et l'espace. Espage géométrique et social."

Rappelons les paroles du Corbusier : "Là où naît l'ordre, naît le bien-être"

Mais Pastoureau écrit également : "Géométriquement et métaphoriquement, le lien est très fort entre les rayures horizontales du vêtement pénitentiaire et les rayures verticales que forment les barreaux de la prison. En français moderne, le verbe rayer a le double sens de faire des raies et de retrancher, supprimer, éliminer. "

Les rayures ont donc ici un sens négatif. Cela induit-il que pour Tati, la modernité (maison des Arpel, école, usine, restaurant) correspond à des barreaux ? L'espace moderne serait-il, pour lui, comme une prison ?

Permis d'habiter

13-21mn

- Une maison à visiter et pas à habiter. - L'usine de Madame, l'usine de Monsieur. - C'est la façon dont les personnages se servent de l'espace qui est critiquable. Ils s'en rendent prisonniers. Néanmoins, la revanche de l'humain sur l'espace froid de la modernité est possible : c'est le joyeux désordre de la garden-party.

La mode

- Monsieur et Madame Arpel, leur enfant, leur chien : ils suivent les codes (les ordres) de la mode. Il y a un total look, le goût de l'ordre, tout doit être assorti. - Madame Arpel est le faire-valoir de son mari. Elle est un miroir social, un symbole de la réussite de son mari. - Dans les années 1950, on n'apprécie pas la récupération. On veut oublier les privations de la guerre. On veut consommer du neuf. - Les enfants : d'un côté les enfants du quartier de Hulot aux pulls tricotés et re-tricotés, de l'autre le petit Gérard au look impeccable mais qui s'ennuie. - La voisine représente une sorte d'avant-garde de la mode. - Monsieur Hulot possède une tenue banale et passe-partout. Il peut être partout et nulle part. Il peut s'échapper. C'est un personnage magique en dehors des conventions sociales qui passe d'un milieu à l'autre comme les petits chiens et les enfants. Il n'est ni conformiste ni avant-gardiste, il peut représenter une 3e voie.