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interview incendie

RENNES METROPOLE

Created on November 5, 2020

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Transcript

INTERVIEW / Georges Provost et Gauthier Aubert, universitaires et auteurs du livre "Rennes, l'incendie 1720"

Tout n’a-t-il pas déjà été dit sur l’incendie de 1720 ?

"Au contraire ! Si la reconstruction de la ville a été bien étudiée, notamment dans deux thèses datées de 1923 et 1972, peu de choses ont été écrites sur l’événement, ou sur

ce qu’on pourrait appeler l’objet catastrophe. Le livre « Rennes, 1720 » croise les deux dimensions tout en réinterrogeant le déroulé de la tragédie. Pour nous, c’est un peu la suite d’ « Une histoire de Rennes », parue en 2006. Nous avions déjà l’habitude de croiser les Rennais à la messe et au parlement. Nous les rencontrons cette fois dans les rues d’une ville livrée à elle-même et à la panique."

INTERVIEW / Georges Provost et Gauthier Aubert, universitaires et auteurs du livre "Rennes, l'incendie 1720"

Quelle est votre lecture de l’événement ?

"Cela pourra paraître étrange à certains, mais la lumière est venue d’Australie et d’un collègue spécialisé dans les incendies, nommé David Garrioch.

Il nous a d’abord fait prendre conscience que celui de 1720 fut l’un des plus gros en Europe, au XVIIIe siècle. Il nous a également permis de pénétrer au cœur du brasier pour comprendre précisément les enchaînements de la tragédie. En résumé, son analyse est la suivante : les mécanismes habituels de régulation du drame n’ont pas fonctionné."

INTERVIEW / Georges Provost et Gauthier Aubert, universitaires et auteurs du livre "Rennes, l'incendie 1720"

Pour quelles raisons ?

"Il faut d’abord se souvenir que le feu s’est déclaré un dimanche, il y a eu un déficit de surveillance collective, une sorte de torpeur dominicale.

Le second élément du drame est météorologique : les vents sont forts et tournants, et il ne pleut pas. Le printemps a été sec et les réserves d’eau sont au plus bas. Ajoutez à cela, l’accès à la Vilaine, très difficile… Le 3e ingrédient de ce cocktail explosif est la structure de la ville elle-même : une cité en bois, aux ruelles serrées, passée de 15 000 âmes à l’époque de la duchesse Anne, à 40 000 habitants. Rennes s’est densifiée en hauteur."En l’absence de pompiers, la cité compte sur les milices bourgeoises et les artisans du bâtiment pour réagir, mais nous avons déjà vu que ces derniers avaient la tête ailleurs. Face à l’inertie, la ville a cédé à la panique, et les habitants au chacun pour soi. Ensuite, le temps est venu de trouver des coupables : le menuisier Boutrouel ? La soldatesque du Régiment d’Auvergne ? Une punition divine ? Faites votre choix."

INTERVIEW / Georges Provost et Gauthier Aubert, universitaires et auteurs du livre "Rennes, l'incendie 1720"

Il a fallu ensuite reconstruire une ville détruite à 40 %...

"Cela a conduit à une modification de la sociologie du centre ville. De son côté, la noblesse n’en a pas profité non plus pour investir la ville.

De fait, on recense peu d’hôtels particuliers à Rennes, contrairement aux immeubles de rapport, qui évoquent la force d’une bourgeoisie rennaise structurée. Nous avons également découvert que le rôle des habitants avait été primordial dans les choix d’urbanisme qui ont suivi. Ces derniers ont par exemple réussi à faire échouer le projet de reconstruction d’Isaac Robelin, avec ses immeubles en pierre, trop hauts et trop chers. Formé à l’école de Vauban, ce dernier rêvait d’une ville nouvelle. Quoiqu’il en soit, ce fut un peu le budget participatif avant l’heure."

INTERVIEW / Georges Provost et Gauthier Aubert, universitaires et auteurs du livre "Rennes, l'incendie 1720"

La plupart des monuments ont été épargnés, n’est-ce pas un peu miraculeux ?

"Outre la perte irréparable du beffroi, c’est un fait que peu de monuments été démolis. Aucune église, aucun couvent...

Le feu s’est éteint devant le Parlement de Bretagne, l’église Saint-Germain, la Cathédrale Saint-Pierre. Dans l’esprit du peuple, on est passé en quelques jours de la punition de Dieu à sa protection. Aujourd’hui encore, plus d’une centaine de niches à Vierge entretiennent le souvenir de cette intervention divine, sur les façades des immeubles rennais. Bénie soit la pluie !"

INTERVIEW / Georges Provost et Gauthier Aubert, universitaires et auteurs du livre "Rennes, l'incendie 1720"

Un petit scoop pour finir ?

"Nous avons enfin des nouvelles du menuisier Boutrouel ! Qu’était devenu l’artisan pyromane de la rue de Tristin ? Avait-il péri dans l’incendie ?

Jusqu’à présent, le mystère restait entier, mais nous retrouvons sa trace quelques mois après la tragédie, près d’Avranches, dans sa Basse-Normandie natale, où l’artisan petit bourgeois est parti se faire petit."